L’ingénierie financière a beaucoup fait parler d’elle lors de la crise des surprimes, à laquelle elle a apporté sa pleine contribution. On découvre d’autres méfaits de sa part lorsqu’elle contribue au montage de structures complexes de l’endettement des entreprises qui connaissent un sucés grandissant. Pour le moins, celle-ci ne facilite pas un accord des créanciers lorsque les entreprises se réfugient derrière la fameuse loi américaine sur les faillites (« chapitre 11 ») qui les en protège en leur permettant de se réorganiser afin de survivre.
Devant les exigences des investisseurs en matière de rendement de leurs capitaux – ayant comme référence ceux mirifiques des actifs financiers – les gestionnaires préfèrent s’endetter dans l’espoir de jours meilleurs. En distribuant des garanties par petits bouts afin de minimiser le coût global de leurs emprunts. Une compagnie d’aviation va ainsi garantir sa dette avec ses programmes de fidélité ou ses droits de trafic, de préférence qu’avec ses avions. La propriété intellectuelle a la cote, d’autant que sa valorisation peut être complaisante.
Mais la médaille a son revers. Lorsque vient le moment où un accord de l’ensemble des créanciers est nécessaire, qui suppose un accord du partage du gâteau, celui-ci devient difficile à dégager, faute de consensus à propos de la valeur de l’entreprise. Chaque créancier essaye alors de tirer son épingle du jeu. Il ne reste plus alors à l’entreprise d’autre choix que de liquider dans le désordre ses actifs pour éviter de déposer son bilan. Un organigramme international de plus en plus complexe – quand c’est le cas – rend l’exercice encore plus aléatoire, la transparence n’étant pas sa qualité première.
Une nouvelle loi peut être inscrite au fronton du système financier : plus il se complexifie pour garder son équilibre, plus il s’opacifie et au bout du compte se fragilise ! Les algorithmes omniprésents s’inscrivent aujourd’hui dans la même logique en raison de leur nature impénétrable. À croire qu’ils pourraient prétendre à la succession d’une démocratie représentative en bout de course, le reste n’étant que façade et endoctrinement qui loin de la réduire accroissent la fracture sociale.