Dans la banque et l’assurance européennes, l’heure est au changement de modèle. Les banques répercutent dans de premiers pays la taxation de leurs dépôts à la BCE, tandis que les compagnies d’assurance cherchent à en finir avec la garantie du capital de leurs contrats d’assurance-vie. Mais les réactions des déposants et des souscripteurs sont dans les deux cas une grande inconnue et imposent la circonspection.
Confrontées aux taux négatifs massifs du marché obligataire, les gérants réfléchissent à une nouvelle génération de leurs contrats d’assurance-vie où la part serait faite belle aux « unités de compte ». Cette dénomination anodine désigne des investissements dans des actifs financiers volatiles, d’où le risque sur leur capital que les souscripteurs devraient dans l’avenir assumer.
On ne parle pas d’une petite affaire, l’encours des contrats d’assurance vie s’établissait en France à fin février à quelque 1.728 milliards d’euros, en progression de 2% sur un an, ce placement phare étant retenu par 45% des ménages. Les collectes de l’assurance-vie et du Livret A qui appartiennent à la même famille en raison de la garantie du capital sont en progression, ce qui témoigne d’une forte incitation à épargner dans un monde ressenti comme inquiétant où l’avenir n’est pas assuré.
L’argument ne va pas manquer d’être abondamment utilisé : en achetant ces nouveaux contrats, les souscripteurs favoriseront la croissance et l’emploi. Mais il va falloir beaucoup de doigté – de pédagogie revendiquent les assureurs – pour réaliser cette mutation aux lourdes implications financières et politiques. Il ne s’agit plus de donner le choix entre plusieurs options contractuelles plus ou moins et potentiellement rémunératrices et risquées, mais de réduire les gains des « fonds euros » à garantie de capital afin qu’ils ne protègent plus de l’inflation, aussi basse soit-elle. Pour faire avaler la pilule, les pertes en capital encourues seront limitées à un pourcentage donné, et il sera fait miroité les gains qui pourront en être attendus. Et le piège se refermera, la sécurité de l’épargne aura disparue et les compagnies d’assurance respireront.
Toujours plus.
Alors que les réserves des compagnies d’assurance permettraient de passer la cap, c’est à une véritable spoliation des épargnants qui se profile.
Plutôt que de prendre le risque de perdre en capital, les dessous de matelas vont reprendre du service.
Il suffirait pourtant que les compagnies d’assurance vie ferment leurs fonds euro aux nouvelles souscriptions, éventuellement de façon temporaire, pour sécuriser l’épargne accumulée.
Banques et assurances étant liées, leur objectif est de maximiser les profits et supprimer toute contrainte notamment l’obligation de garantie du maintien en capital afin de drainer cet argent vers les marchés financiers et les fonds actions.