On ne compte plus les effets des flots de liquidité gratuites ou à très bas prix qui inondent le système financier. Et ce n’est pas fini, la Fed et la BCE s’apprêtant à baisser à nouveau leur taux.
À défaut de parvenir à favoriser la relance, les banques centrales cherchent à prévenir une récession. Ayant déjà à leur actif la constitution de bulles sur le marché des actions, elles ne s’en tiennent pas là et contribuent désormais à la formation d’une bulle obligataire fruit de la frénésie d’émission des grandes entreprises. Il ne reste plus qu’à prier que les taux obligataires restent durablement très bas, faute de quoi des défauts seront inévitables.
La mauvaise habitude a été prise de ne prendre en considération que la dette publique – pour la vilipender – et d’ignorer la privée. Mais il faut revenir sur terre, les deux vont de pair.
Décidément, rien ne marche plus comme avant. Si la valorisation en Bourse des grandes entreprises est si élevée, c’est moins en raison de leurs résultats que de l’effet de l’acquisition de leurs propres actions, afin d’en faire monter le prix au profit de leurs actionnaires. Elles peuvent procéder à ces achats en émettant des titres obligataires à des conditions très avantageuses, ce dont elles ne se privent pas.
Lorsqu’elles n’enrichissent pas ainsi leurs actionnaires, ces mêmes entreprises transnationales veillent à échapper au maximum à l’impôt. Une étude de collaborateurs du FMI vient d’estimer que près de 40% des investissements directs des entreprises (IDE) – que les économistes utilisent pour mesurer l’attractivité d’un pays – sont tout simplement destinés à « l’évitement fiscal ». Fruit de l’ingénierie financière, ils n’ont rien à voir avec une activité en prise avec l’économie réelle, ce qui conduit l’étude à qualifier ces capitaux de « fantômes ».
Il est loin le temps où les banquiers centraux assuraient qu’ils pourraient assécher facilement les liquidités qu’ils distribuaient avec prodigalité. Le sentiment qui prévaut aujourd’hui est qu’ils ont emprunté un chemin sans retour. Que le système financier fait preuve d’addiction et exprime clairement qu’il en veut toujours plus pour encore moins cher. Une situation qui tourne à l’absurde, vu que les investisseurs peinent déjà à placer leurs capitaux et à trouver du rendement. Elle n’est pas étrangère à la naissance du marché des ETF, ces instruments financiers qui répliquent le comportement des actions, des indices ou du prix des matières premières.