Le temps suspendu

Un rebondissement de la crise européenne était redoutée, mais peut-être pire est-il en train d’intervenir : un nouveau scénario se présente, plus redoutable au sens où il ne présage rien de bon.

Il se joue sur un fond de décor économique dégradé, marqué par la faiblesse d’une croissance qui n’est plus salvatrice et des gains insuffisants de productivité, ainsi que par les pesantes incertitudes d’un système financier à l’instabilité accrue. Le capitalisme perd le rendement qui le stabilisait, et la poursuite d’une assistance des banques centrales est clairement requise.

La normalisation annoncée des programmes non conventionnels de celles-ci se fait attendre, le resserrement monétaire est joué petit bras. Les mesures accommodantes n’ayant pas disparues après un départ en fanfare qui tourne court, vont-elles devenir permanentes ? Tout se passe comme si le capitalisme, tout en étant conscient de ses faiblesses, ne parvenait pas à s’en débarrasser et à se réformer, car c’est sur ses œuvres vives qu’il devrait agir. Par ses limites, la régulation financière l’illustre à merveille, et par son côté éléphant dans un magasin de porcelaine, Donald Trump l’exprime à sa façon.

Les ténors de la politique internationale sont réduits à exprimer leur impuissance. Eux aussi souffrent de la disparition de leurs repères, dont il est décidément fait table rase, ne trouvant pas de recours dans leur pensée dogmatique pour orienter leur action. Faute de mieux, ils puisent dans un mince livre de recettes et se réfèrent à un corpus idéologique qui rétrécit comme peau de chagrin.

L’essoufflement de leurs discours renvoie à la vanité de leurs promesses. Les élites ne sont plus crédibles, et c’est leur drame, les sociétés développées sont secouées par une crise globale dont elles ne sont pas prêtes de sortir. Une seule démarche serait possible pour y parvenir, sortir du cadre désormais étriqué du capitalisme financier. Certes, les éléments novateurs d’une société alternative s’esquissent petit à petit, porteurs de ruptures au sein d’un catalogue de réformes que, pour le coup, on pourrait appeler structurelles. Mais quel sera l’assembleur ? et le détonateur ?

Il y avait la classe ouvrière comme moteur de la lutte des classes et cela n’a pas marché ; aujourd’hui, les gens et le peuple lui succèdent. N’est-ce pas un peu court ?

7 réponses sur “Le temps suspendu”

  1. C’est un peu court au sens où les gilets jaunes ne font pas une critique frontale du capitalisme, qui serait pourtant urgente de faire, et plus seulement à la marge comme le rappelle sur son blog Paul Jorion. Mais il s’attaque à quelques uns de ses effets les plus néfastes, en particulier les inégalités, dans l’aménagement du territoire qui renvoie à la question des services publics, et s’agissant des revenus. Il faut bien commencer quelque part, les luttes sociales ne se décrètent pas, elles trouvent le terrain qui convient le mieux à la situation réelle du capitalisme contemporain dans un contexte national.

    Les GJ ont permis d’ores et déjà de remettre, certes avec tous les défauts inhérents à un mouvement composite, au centre du débat la question sociale, ce que n’ont pas réussi à faire les syndicats et les partis politiques depuis de nombreuses années. C’est trop peu mais mieux que rien, c’est une entaille dans le statu quo, dont on ne peut présager la suite, mais une entaille qu’il est difficile de nier. Ce sont quelques coins qui sont enfoncés et obligent au débat, un débat qu’ils ont objectivement provoqué même si certains gilets jaunes refusent tout débat encadré par les institutions de la République.

    A l’actif de ce mouvement : la question de la justice fiscale, celle du pouvoir d’achat. Le coup de projecteur sur les questions essentielles liées à la proximité, comme accès à des services et des biens, or la proximité c’est très important si l’on s’intéresse par exemple aux circuits courts.
    A son actif notons encore qu’il popularise l’idée qu’il faudrait réduire la TVA sur les produits de première nécessité, ce qui est un pas en avant vers la gratuité. Toujours bon à prendre.
    Le mouvement ne se réduit pas à ces aspects positifs, mais éluder leur existence sous prétexte qu’il y a de mauvaises choses en son sein, ne fait pas avancer les choses…
    Ainsi ne vois pas d’autre attitude que celle pragmatique et constructive qui consiste à soutenir tout ce que ce mouvement comporte d’éléments progressistes, ne pas aller sur ce terrain c’est abandonne le terrain à ses éléments mortifères.

    1. Vous manquez beaucoup en éludant le constat de la puissance autonome du mouvement. D’autre part, l’occasion manquée à ce jour, passée inaperçue, a été l’incapacité du féminisme français à appuyer massivement la manifestation des femmes GJ de début janvier. C’est en se recomposant autour de ces précaires, chômeuses et travailleuses pauvres que le mouvement peut peut-être s’échapper de la nasse mise en place par les fascistes et les macroniens, que bientôt plus grand chose ne distinguera. Les femmes américaines avaient montré la voie avant et après l’élection de Trump. Assurément on les reverra se mobiliser. Même les démocrates corrompus l’ont compris. Mais quoiqu’il en soit il faudra que le féminisme s’arrache à sa déclinaison mainstrean. Ce que réalise sous nos yeux les femmes GJ.

  2. Vous manquez beaucoup en éludant le constat de la puissance autonome du mouvement. D’autre part, l’occasion manquée à ce jour, passée inaperçue, a été l’incapacité du féminisme français à appuyer massivement la manifestation des femmes GJ de début janvier. C’est en se recomposant autour de ces précaires, chômeuses et travailleuses pauvres que le mouvement peut peut-être s’échapper de la nasse mise en place par les fascistes et les macroniens, que bientôt plus grand chose ne distinguera. Les femmes américaines avaient montré la voie avant et après l’élection de Trump. Assurément on les reverra se mobiliser. Même les démocrates corrompus l’ont compris. Mais quoiqu’il en soit il faudra que le féminisme s’arrache à sa déclinaison mainstrean. Ce que réalise sous nos yeux les femmes GJ.

  3. le mouvement ouvrier et révolutionnaire, spontanée et de contestation des gilets jaunes, ne remet pas en cause directement le capitalisme.

    Rien de plus normal. Jamais un mouvement révolutionnaire ne remet en cause spontanément un système lorsqu’il se met en mouvement.

    Le peuple dit : « je veux ça, je ne veux plus ça », mais il le fait naïvement, et sans s’interroger sur les fondements et les limites du système, sur la faisabilité objective de la possibilité du système de soutenir ses revendications.

    En 1789 le Peuple prend la Bastille. Il dit qu’il ne veut plus les impôts de Necker, il dit qu’il veut du pain, sans se poser la question de la pérennité ou non du système monarchique.

    C’est parce que les élus du tiers état se font congédier, que des rumeurs courent sur des troupes étrangères se massant autours de Paris, que le Paris des faubourgs fracturent les armureries et va chercher de la poudre à la Bastille.

    Aucun parisien à ce moment, aucun français , pas une seule fois, ne met en cause la noblesse et le roi.

    Quand un malheureux se rebiffe, il ne s’attaque pas à un système l’opprimant et l’exploitant, il s’attaque aux conséquences concrètes sur sa vie de ce système.

    Lorsque les ouvriers et paysans russes ( les bourgeois et petits bourgeois aussi ) en février 1917 , remplissent les rues de Peter, ils ne s’attaquent pas directement au tsar, ils le font, là encore, parce qu’ils ont faim, et parce qu’ils ne veulent plus mourir au front.

    Le régime de Nicolas II tombe, parce qu’il y a des forces politiques, des démocrates bourgeois et des socialistes, intéressés à ce qu’il tombe.

    Si le régime de Macron ne tombe pas, c’est parce qu’il y a des forces politiques, des démocrates bourgeois et des socialistes, intéressés à ce qu’il ne tombe pas.

    Dire que la fraction du prolétariat la plus précarisé ( et même une certaine petite bourgeoisie déclassé ), les gilets jaunes, est responsable du fait que le capitalisme ne soit pas remis en cause, c’est quand même un peu gonflé de la part de directions ouvrières, qui elles devraient théoriser ce qui ce passe et expliquer aux masses la nécessité absolue d’en finir avec le capitalisme et Macron.

    Elles se gardent bien de le faire. Elles ne sont pas contre Macron et le capitalisme, elles sont tout contre !

    Le grand débat mascarade de Macron n’existe que parce que l’ensemble des partis politiques en France le tolèrent. Ils convient leurs maires a participer, en figurants, à cette opération de diversion d’un pouvoir monarchiste et sanguinaire au abois.

    La masse des travailleurs en gilets jaunes, et ceux qui s’apprêtent à l’enfiler ne sont pas dupes de la manœuvre de ces partis, qu’ils rejettent dans les urnes, tous !

    Demain ils seront de nouveaux en masse dans les rues de France, à réclamer le départ de Macron.

    A Paris , en attendant que se mette en place une direction élue et mandatée à Commercy, des petits tordus à la solde du RN, s’entêtent à diriger la colère légitime des gilets jaunes, non pas vers le Palais de l’Elysée comme spontanément cela est depuis le début , mais vers le Parlement, symbole de la démocratie.

    Ils veulent nous diriger demain vers l’esplanade des Invalides ! C’est une faute politique majeure.

    Il ne faut pas s’approcher de l’Assemblée Nationale croupion de la cinquième république. Il ne faut pas créer les conditions d’incidents proche de l’Assemblée Nationale.

    Le pouvoir et ses supplétifs ouvriers, qui passent leur temps à affirmer de manière péremptoire, qu’il y a des chemises brunes sous les gilets jaunes, seraient tellement heureux de passer en boucle dans les médias aux ordres, des images ressemblant à celles de février 1934 !

    Demain en masse en gilets jaunes ! Méfiance totale quant aux meneurs auto proclamés !

    A Paris , éloignez vous du Parlement, rapprochez vous du Palais, en attendant de se doter d’une vraie direction démocratique et représentatives du mouvement ouvrier révolutionnaire des GJ le 26 janvier à Commercy.

    Et surtout haussez les épaules lorsque vous croisez un Monsieur très bien éduqué , et très sérieux, vous affirmant que la classe ouvrière n’existe plus, que la lutte des classes fait partie du passé.

    Vous avez en France en ce moment le déroulement d’une lutte des classes chimiquement pure !

    https://tendanceclaire.org/contenu/autre/Commercy(1).pdf

  4. C’EST un peu court de critiquer sur un clavier quand d’autres ce font matraquer et y laissent un œil
    Le début simplement manque les intello s qui reste comme d’hab au chaud.

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