Les ambitions européennes d’Emmanuel Macron continuent de se réduire comme peau de chagrin. Le projet de taxation des GAFA défendu par Bruno Le Maire, le ministre français des Finances, ne va voir le jour qu’une fois inclue une « clause d’exclusion » qui le rendra caduc lorsqu’une « solution internationale » au niveau de l’OCDE, et non plus seulement européen, sera adoptée. C’est le prix à payer, a-t-il reconnu pour convaincre les récalcitrants au sein de l’Union, dont l’Irlande qui a déroulé le tapis rouge fiscal aux GAFA.
Ceux-ci espèrent que les discussions qui vont se tenir au niveau G20 aboutiront à un texte plus favorable. À point nommé, ils vont rencontrer Donald Trump qui met en cause les réseaux sociaux pour leur partialité à son égard. Un deal pourrait en résulter au nom d’intérêts réciproques bien compris.
Mais Bruno Le Maire a une autre urgence, le renforcement du Mécanisme européen de stabilité (MES). Évoquant innocemment la possibilité ultérieure d’un « nouveau problème bancaire », qui est déjà présent mais qu’il tait, il souhaite que cet organisme dispose de « quelques dizaines de milliards d’euros » supplémentaires pour y faire face le moment venu. En réalité, il est à la recherche d’une solution immédiate pour les banques italiennes et grecques qui ploient sous la masse de leurs prêts non remboursés, les fameux NPL. Faute qu’elles parviennent à s’en délester, leur recapitalisation serait inévitable. Et, ne voyant pas les investisseurs se précipiter dans une telle opération, les États devraient alors y pourvoir, ce qui augmenterait leur endettement qu’il faut réduire…
Des mécanismes plus ou moins tortueux sont déjà étudiés, dont l’octroi de garanties publiques aux tranches senior des NPL une fois titrisées par les banques. Mais que vaut vraiment la garantie de l’Italie ou de la Grèce pour les investisseurs par les temps qui courent ? Pour réussir l’opération de délestage des NPL, l’intervention du MES serait donc toute trouvée, mais elle suppose un accord européen, au premier chef avec le gouvernement allemand. Vu son état, ce n’est pas gagné.
Bruno Le Maire demande qu’un accord intervienne d’ici à la fin de l’année, ce qui accrédite la crise bancaire qu’il affecte d’ignorer. Cette décision, remarque-t-il, est « encore plus urgente » que « celle sur un futur budget européen ». Cela ressemble fort à un accord de troc proposé aux dirigeants allemands. La somme envisagée pour doter ce budget européen pourrait changer d’affectation en faveur du MES, au gré des degrés d’urgence.
Confrontés à la masse des NPL résultant de leur politique d’austérité budgétaire, avec comme but final le désendettement, les dirigeants européens suscitent son contraire. Vont-ils être capables de prendre de grandes décisions d’ici l’élection du nouveau Parlement européen et le renouvellement de la Commission ? Le calcul contraire fonde la stratégie du gouvernement italien, qui espère pouvoir atteindre et dépasser ces caps sans avoir à se renier. Dans cet esprit, Matteo Salvini, le ministre italien de l’Intérieur, vient de ruiner tous les espoirs d’Angela Merkel de signer un accord de rapatriement des réfugiés italiens pour satisfaire l’opposition de la CSU qui fragilise la grande coalition et pourrait la faire tomber.
Mais quel est le sens de cet attentisme ? Que peut-il être attendu en termes d’assouplissement de la politique européenne de la future Commission ? Le renforcement du courant xénophobe au Parlement européen n’aura certes que peu d’impact sur sa politique qui va chercher son inspiration auprès du Conseil européen. À ce niveau, le calage du moteur franco-allemand laisse un grand vide et ne permettra pas la prise de grandes décisions.
« Je ne suis pas venu ici pour élever le ton vis à vis l’Europe, notamment parce que, disons la vérité, cette Europe dans six mois c’est fini. » Celui qui prononce cette attaque est le vice-premier ministre italien Luigi Di Maio qui intervient le samedi 6 octobre d’une tribune dressée dans le Cirque Maximus à Rome. « Dans six mois, il y aura des élections européennes et tout comme il y a eu un tremblement de terre politique en Italie le 4 mars dernier, il y aura un tremblement de terre politique lors des élections européennes de mai ».
Di Maio n’explique ni comment les problèmes des banques italiennes pourront être résolus ni comment les traités européens seraient remis en question par le parlement de Strasbourg si le résultat des prochaines élections correspond à ce qu’il prévoit. N’empêche que si le nombre de gouvernements des pays de l’UE qui sont décidés à suivre une politique incompatible avec ces traités continue de s’accroître on ne voit pas très bien comment, puisqu’il n’est pas envisageable de se mettre d’accord pour les modifier, il serait possible de continuer à les appliquer.
Au moins, ça a le mérite d’être clair….Avec toujours le même sens d’anticipation inouï, nos « élites » semblent avoir une guerre de retard. Bruno Le Maire court après un MES qui si je me souviens bien, a déjà été rejeté par l’Allemagne. D’ailleurs il semblerait bien que cette dernière ait déjà prévu la fin de l’euro, soit par convenance personnelle, soit par défaillance des autres. J’espère qu’en France le scénario a été également prévu….drôle d’époque….
Tout cela finira mal …