Le démantèlement de l’Europe est en cours, mais que faut-il entendre exactement par là ? Comment va-t-il se manifester et jusqu’où peut-il aller ? Son scénario commence à se préciser dans la confusion ambiante qui s’accentue.
Les circonstances de la sortie de l’Union du Royaume-Uni sont entourées d’un brouillard de plus en plus dense au fur et à mesure que son échéance de fin mars 2019 se rapproche. Aucune majorité ne se dessine en faveur d’une des options possibles, dont chacune a ses ardents défenseurs, qui se déchirent entre eux, rendant aujourd’hui fort improbable la signature d’un quelconque accord avec Bruxelles dans les délais requis. Ce qui peut présager de la prolongation de la période de négociation initiale de deux ans, faute de mieux, afin d’éviter la brutalité d’une rupture aux effets économiques désastreux.
La situation n’est pas plus claire en Italie et en Allemagne. L’équation budgétaire italienne des années à venir n’a de solution que si les règles européennes sont aménagées d’une manière ou d’une autre, faute de quoi la coalition devra remiser son programme. Or aucune de ces deux éventualités n’est vraisemblable.
Cette situation est d’ailleurs anticipée en Allemagne. Elle prend la forme d’un débat à propos de Target2 – le système de règlement interne des banques centrales de l’Eurosystème – et de la position créditrice de la Bundesbank. À la fin juin, elle l’était dans les écritures rien de moins que de 976 milliards d’euros, dont 481 milliards dus par la Banque d’Italie. Dans une grande confusion, vu la technicité non maitrisée du sujet, les commentaires alarmistes ont fleuri sur un thème par contre sans équivoque : comment serons-nous remboursés ? Une des solutions entrevue parmi les conservateurs allemands serait que la BCE garantisse la dette italienne à l’Eurosystème. Et, pour éviter qu’elle ne grandisse comme c’est inévitable, une exclusion de la Banque d’Italie de celui-ci serait à bien y réfléchir la meilleure solution… Un très sale coup porté à l’euro.
Peter Boehringer, le député du parti d’extrême-droite AfD qui préside le comité du budget au Bundestag, a critiqué le ministre Olaf Schulz pour ne pas provisionner le risque de défaut sur les créances de la Bundesbank inscrites dans Target2. Les campagnes de l’AfD payent dans l’opinion. Le dernier sondage de l’institut Emnid, qui date du 7 juillet, est à cet égard illustratif. L’alliance CDU/CSU plafonne désormais à 30% des intentions de vote, et le SPD est crédité de 17% des voix, à égalité avec l’AfD. En application de ces pourcentages, la coalition au pouvoir ne serait plus majoritaire et ne détiendrait plus que 47% des voix au Bundestag, ce qui impliquerait de l’élargir, mais pour appliquer quelle politique ?
Nos édiles européens se sont eux-mêmes enfermés dans un carcan dont ils ne peuvent se débarrasser, le voudraient-ils. À l’habitude ils vont tenter de gagner du temps, mais ce sera en vain car les contradictions se resserrent. Il ne restera plus aux autorités allemandes qu’à en tirer les conclusions à leur façon.
A propos de la sortie de l’Union du Royaume Uni, nous avons vu que le dernier ministre démissionnaire fut immédiatement remplacé par un personnage qui était anti-brexit.
Inutile de rappeler que Mme May était contre le Brexit.
Dès lors ne pensez vous pas que ces dirigeants cherchent à faire durer le »plaisir » afin qu’au terme de 3 voire 4 ans de palabres infertiles une majorité des électeurs décident de (re)voter pour le maintien dans l’Union ?
Une façon comme une autre d’annuler le vote initial du peuple qui jetera l’éponge par lassitude. Déni de démocratie mais ce ne sera pas la première fois. (voir 2005 en France).
Idéalement, dans une telle hypothèse, si l’économie était chancelante et que le Brexit soit exagérément et volontairement compliqué, il est probable que dans les années qui viennent l’électorat se retourne.
Qu’en pensez-vous ?
L’équation de complexifie, et bienheureux celui qui entrevoir ce qui va se passer d’ici, mettons, 2 ans. Les faits majeurs relatés (Italie, Allemagne, Grande Bretagne) font montre de contradictions internes de plus en plus considérables, (en France le macronisme donne l’illusion d’une ligne un peu prêt continue en dépit d’une opinion de plus en plus hostile). La crise sourde, sans que l’on puisse percevoir une direction tellement les forces sont contraires. Mais le statu quo est il tenable encore longtemps ?
« À la fin juin, elle [la Bundesbank] l’était [créditrice] dans les écritures rien de moins que de 976 milliards d’euros, dont 481 milliards dus par la Banque d’Italie. Dans une grande confusion, vu la technicité non maîtrisée du sujet, les commentaires alarmistes ont fleuri sur un thème par contre sans équivoque : comment serons-nous remboursés ? »
Je crois avoir compris que la règle pour les pays dont la balance commerciale est excédentaire est de prêter à un client déficitaire de quoi payer ce qu’ils lui vendent. Je suppose que si vous n’êtes pas plus explicite sur l’Italie, l’Allemagne et Target2 c’est que dans ce cas ça n’est aussi simple…
Par contre je crains qu’il n’y ait aucun risque à prévoir que ces quelques 481 milliards dus par la Banque d’Italie font que les promesses du M5S de mettre fin à l’austérité et de desserrer les cordons de la bourse en faveur des italiens les plus défavorisés n’ont quasiment aucune chance de se réaliser. Si l’Allemagne choisit de récupérer ses billes (ou menace de le faire) elle risque fort de choisir en même temps de couler le M5S et Di Maio au profit de la Ligue et de Mateo Salvini.
Lors des dernières élections italiennes il a été fort peu question des problèmes monétaires et financiers à régler. Les partis précédemment au pouvoir ne pouvaient certes pas se vanter de leurs sucés dans ce domaine mais ceux qui voulaient leur succéder ont jugé plus prudent de ne pas exposer leurs intentions de manière explicite.
Quand Berlusconi a du laisser la place à Mario Monti il a déclaré qu’il était personnellement favorable programme que Bruxelles avait décidé d’imposer à l’Italie mais que les italiens ne l’accepteraient jamais. Il ne semble pas que la situation ait beaucoup évolué depuis …
Oui, une petite explication simple des 481 milliards d’euro dus, si J’ai bien compris par la Banque d’Italie à la Bundesbank, serait bienvenue. Car il me semble comprendre que tout ce que recherche la partie allemande, c’est un dispositif qui puisse la garantir d’un défaut……Et qu’en est-il en France ?