Le ton monte, les menaces se multiplient, l’escalade qui reste encore verbale bat son plein. Les autorités chinoises ont visé juste avec leur dernière liste de produits américains, dont la taxation frapperait l’électorat de Donald Trump. Il n’a pas tardé à surenchérir en demandant dès le lendemain au ministère du commerce (USTR) d’élargir la liste des produits chinois sur laquelle il travaille, afin de doubler la mise initiale pour que les taxes à l’importation sur les produits chinois rapportent désormais 100 milliards de dollars, comblant d’autant le déficit commercial.
Pour le président américain, qui n’est pas à une nuance près, la guerre commerciale a commencé depuis longtemps, avec comme effet le colossal déficit commercial américano-chinois. Car c’est ainsi qu’il caractérise les effets de la mondialisation. « Nous ne sommes pas dans une guerre commerciale avec la Chine, cette guerre a été perdue il y a de nombreuses années par des personnes stupides ou incompétentes, des personnes représentant les États-Unis », a-t-il tweeté. Par parenthèses, Benoît Cœuré n’est pas plus pertinent lorsque, analysant pour la BCE les dégâts potentiels de la guerre commerciale en cours, il déclare superbe que « cela priverait les peuples des indéniables avantages apportés par le commerce et l’intégration et exacerberait les difficultés économiques des plus pauvres ». En guise de réflexion sur la mondialisation, c’est un peu court.
À l’heure des mises en cause, il n’y a pas foule !
Les dirigeants chinois n’ignorent pas qu’à force de menaces réciproques, il faudra soit négocier, soit passer à l’acte, mais en attendant ils poursuivent la partie sur un autre mode, tout en avertissant que « la Chine est prête à aller jusqu’au bout, quel qu’en soit le prix ». La partie est désormais trop engagée pour qu’il soit permis d’en douter.
Zhang Ming, son ambassadeur auprès de l’Union européenne, a rappelé dans une déclaration dénonçant le protectionnisme américain, que « dans un monde où les incertitudes sont grandes, une relation stable entre l’UE et la Chine est un précieux atout » car elles ont pour responsabilité « de faire respecter l’ordre commercial multilatéral basé sur des règles. » Pour faire bonne mesure Wang Yi, le ministre chinois des Affaires étrangères a appelé depuis Moscou à la mobilisation internationale contre Washington : « la communauté internationale doit s’opposer dans son ensemble à de telles actions unilatérales et violations des règles, défendre dans son ensemble la croissance de l’économie mondiale et aider ceux qui pensent que tout leur est permis à retrouver le bon sens ».
Le respect des règles de l’OMC, afin d’éviter « le retour à la loi de la jungle », est-il un terrain sur lequel les dirigeants chinois et européens peuvent se retrouver, après que ces derniers aient appelé Donald Trump a ne pas se tromper de cible en lui désignant la Chine ? On n’en est plus à la question de départ des surplus de production chinois d’acier et d’aluminium.
Emmanuel Macron et Angela Merkel vont se rendre l’un après l’autre à Washington, comme s’ils espéraient pouvoir encore calmer le jeu et infléchir le président américain. À moins que la chancelière joue perso et recherche un accord sur la taxation de l’acier et de l’aluminium, pour l’instant suspendu, et se désolidarise des chinois… Il va falloir choisir son camp.
Mais la dynamique qui est engagée favorise le chacun pour soi, auquel ils ont pourtant tous à perdre… Car aucune alternative à une mondialisation en fin de vie n’apparaît. Et pour cause, cela imposerait de sérieuses mises en cause. Il en va ainsi également de la dette, comme les négociations sur celle de la Grèce vont très prochainement le montrer : il n’est pas question d’une remise de peine, mais seulement d’un rééchelonnement et d’une période de grâce pour le paiement des intérêts.
Avec une opiniâtreté à laquelle il faut rendre grâce, ils creusent…
Que serait une démarche autre que le « chacun pour soi » ?
La bonne démarche n’est ni le chacun pour soi ni la mondialisation telle qu’elle est, mais le retour à une coopération telle qu’elle fut brièvement envisagée à partir de la Charte de La Havane au lendemain de la seconde guerre mondiale. Bien évidemment il ne faut par revenir à un protectionnisme dangereux. Il faut simplement que les comptes extérieurs de chaque pays puissent être relativement équilibrés, ce qui suppose des concertations périodiques internationalement organisées concernant notamment la révision ordonnée des taux de change. De quoi revoir les missions de l’OMC, de la finance, de l’UE, etc. beaucoup de travail….
Merci .
https://fr.wikipedia.org/wiki/Charte_de_La_Havane
Merci beaucoup pour le lien, effectivement la preuve qu’une autre mondialisation est possible, mais le grand frère américain n’y avait-il pas vu une entrave à son hégémonie ?
Je remets ça aussi , un peu simplifié , pour compléter le décor , et pour autant que scène signifie quelque chose avec des « acteurs » comme Trump :
http://www.la-revanche-des-ses.fr/Docsdossier152008.pdf