Combien de mois va-t-il falloir attendre avant que la situation italienne ne s’éclaircisse ? Matteo Salvini de la Ligue et Luigi Di Maio du Mouvement des 5 étoiles (M5S), les deux vainqueurs des élections, aspirent à la présidence du Conseil, mais ne peuvent seuls y accéder. Leur alliance en vue de la constitution d’un gouvernement est à priori la seule solution, mais elle est problématique car ils représentent des clientèles différentes, au nord et au sud d’un pays qui est clairement divisé en deux. Les programmes des deux formations l’illustrent en défendant un taux unique d’imposition de 15% pour la Ligue et un revenu minimum pour le M5S.
Quoi qu’il en soit, leur alliance serait la pire des issues pour les autorités de Bruxelles, qui y voient un fort potentiel de tensions et d’affrontements ainsi que la mise en cause des règles budgétaires, avec en ligne de mire l’impossibilité pour le pays d’assurer le service de sa gigantesque dette, créant une situation vis-à-vis de laquelle les autorités européennes ne sont pas armées. L’Italie n’est pas la seule source potentielle de future instabilité économique de la zone euro, mais c’est la plus probable.
Les tractations qui vont commencer sous l’égide du président Sergio Mattarella peuvent s’éterniser, mais un rendez-vous est pris en novembre prochain, échéance naturelle de l’adoption du budget 2019, tout du moins si un gouvernement est entretemps constitué. L’alternative serait que les électeurs soient à nouveau convoqués, le M5S et la Ligue pouvant chacun espérer améliorer son score et négocier la suite dans de meilleures conditions. Mais il n’en restera pas moins qu’une dynamique est clairement acquise, qui se traduit par l’appartenance de 60% des députés et des sénateurs à des partis populistes qui n’ont pas pour priorité de respecter les règles budgétaires européennes.
Cela n’empêche pas Emmanuel Macron de s’intéresser de près à l’évolution de la situation italienne, au cas où il pourrait y trouver matière à la concrétisation de ses plans d’alliance au sein du parlement européen qui sera issu des élections de 2019. Il y est conforté par le positionnement de centre-gauche adopté par le M5S, bien qu’une forte interrogation porte sur la récente conversion pro-européenne du mouvement : est-elle réelle ou tout simplement tactique, afin que Luigi Di Maio devienne premier ministre ? En tout état de cause, cela supposerait une décantation de la situation italienne et un accord du M5S avec le Parti démocrate, qui pour l’instant s’y refuse catégoriquement. Mais ce schéma est bel et bien agité dans la presse italienne qui en fait ses choux gras. Avec comme enjeu la création d’un nouveau groupe au sein du Parlement européen, auquel pourraient se joindre les élus de Ciudadanos, qui a le vent en poupe en Espagne et pourrait succéder à Madrid au Parti populaire de Mariano Rajoy, ou bien même encore ceux de Syriza.
Merci François, habitant en Italie, je partage en grande partie vos propos.
Néanmoins attention à l’emploi de la parole fourre-tout « populiste » , et – dans le cas italien – mettre dans le même panier 2 partis aussi différents que le M5S et Lega (Lega qui a des affinités avec le Front National)
Je déteste ce terme qui a pour but d’amalgamer « les extrêmes », cette vieille antienne, et je ne l’ai utilisé qu’avec des pincettes pour marquer la distanciation.
oui, attention… M5S comme extrème… on a vu pire… 😉
Un éclaircissement sur les positions (actuelles) du mouvement cinq étoiles serait le bien-venu.Pour ma part j’y perd mon latin !
Pour tenter de se faire une idée du mouvement 5 étoiles. on peut consulter : https://fr.wikipedia.org/wiki/Mouvement_5_%C3%A9toiles#Idéologie
Il n’est pas certain que les choses paraissent plus limpides après l’avoir lu mais ça permet au moins de constater qu’il ñ’est pas possible de le situer sur l’échelle droite-gauche traditionnelle, celle qui est utilisée de manière assez cohérente dans beaucoup de pays d’Europe.
Son opposition au droit du sol et sa participation au même groupe que UKIP au parlement européen permettrait de le classer sans hésiter à l’extrême droite.
Ses positions anti-capitalistes, son refus de rembourser la dette et sa dénonciation du néolibéralisme permettraient de le classer à l’extrême gauche.
On peut aussi remarquer que le mouvement est pour l’autorisation du mariage des homosexuel (qui reste illégal en Italie), participe activement à des actions pour l’environnement et à l’opposition à ce que nous appelons TGV Lyon-Turin, et qu’il est favorable à la gratuité des soins médicaux.
Le mouvement est par ailleurs farouchement opposé à l’élection de toute personne ayant subi une condamnation judiciaire (c’est le cas d’une proportion incroyablement élevée des élus en Italie – l’achat pour un million d’euros du vote sur la confiance au gouvernement d’un député (PD) de Naples n’a nullement empêché Berlusconi de rester à la tête de son parti.)
Si ses plus grand succès aux récentes législatives ont eu lieu dans le Sud, il a aussi remporté (entre autres) les mairies de Turin et de Rome.
Pour ce qui est du folklore, on peut citer le slogan « vaffanculo » dont je ñ’ose pas donner la traduction littérale mais que j’attribue à la proximité de Beppe Grillo avec la tradition de la commedia dell’arte ou le côté geek de Gianroberto Casaleggio qu’il était parfois difficile de prendre au sérieux à propos de l’utilisation d’Internet. J’ai par contre noté les cheveux courts et la cravate de Luigi Di Maio (mais pas encore pu vérifier si ça s’accompagne bien de chaussures noires impeccablement cirées…)
Pour en revenir au sujet de l’article de F.L. je dirais que ce qui me frappe le plus quand je parcoure les journaux italiens c’est le peu de cas qui est fait des contraintes financières et monétaires imposées par l’UE et la zone euro à l’Italie. Les italiens paraissent ne pas avoir encore pris conscience de ce que le pouvoir réel des gouvernements italiens est fortement limité par les traités européens…
Merci G L
Certains crient à l’euroscepticisme, à la sortie de l’euro, à la crise de l’Europe,à la peur…..etc.Ils sont simplement hors sujet et comprennent bien peu de choses aux réalités économiques et aux aspirations populaires.Tous les peuples européens sont attachés à l’Europe.En revanche un nombre grandissant de peuples pensent avec raison que les politiques néolibérales sont totalement inefficaces économiquement et très injustes socialement.Que faire ?Tourner le dos à des politiques austéritaires et mortifères qui ont fait la preuve de leur ineffiscience.Le cas portugais est intéressant également :les résultats économiques sont bons dans l’ensemble.Wait and see.Une chose est certaine :la camisole austéritaire craque de toutes parts avec son cortège de désolations sociales,d’injustices criantes et de responsables publics condamnés à dégager ou à prendre le chemin de la prison.La misère et l’injustice ont atteint un niveau juste insupportable en Europe. Bonne chance à nos amis italiens !