Selon des résultats encore partiels, le Mouvement des cinq étoiles recueillerait à lui seul plus de 31% des voix, la coalition formée par Forza Italia et la Ligue obtiendrait environ 37%, et le Parti démocrate (PD) 19%. Aucune solution gouvernementale ne sort de la consultation, et l’hypothèse de la tenue de nouvelles élections est déjà sur la table.
À la différence de l’Allemagne, qui a fait l’expérience d’une situation nouvelle lorsqu’elle a voulu renouer avec la formule éprouvée de la grande coalition, l’Italie ne sort pas de sa routine politique faite de combinaisons et d’instabilité avec les élections de ce week-end. Mais son savoir-faire ne la fait pas progresser.
Cela ferait toutefois injure au Mouvement des 5 étoiles, devenu premier parti par le nombre de ses électeurs, de ne pas voir en lui une tentative d’aggiornamento, qui n’aboutit cependant pas. Quoi que l’on pense de ses options politiques et de la faiblesse de son ancrage idéologique. La vie politique italienne va plus que jamais être marquée par son émergence, ainsi que par le rejet de la classe politique traditionnelle, l’exaspération face au marasme économique et les tensions autour des réfugiés. Avec l’extrême-droite, il est le mieux placé pour capitaliser sur celui-ci, sans pouvoir prétendre remporter le gros lot.
Le PD de Matteo Renzi et Forza Italia de Silvio Berlusconi sont les deux formations perdantes, et leur rapprochement n’est plus la solution espérée dans les coulisses bruxelloises. Le premier doit résister aux pressions afin qu’il démissionne, le second a été dépassé en voix par son partenaire de coalition. Les deux vainqueurs sont Luigi Di Maio pour le Mouvement des Cinq étoiles et Matteo Salvini pour la Ligue, mais leur rapprochement est difficilement concevable.
La montée en puissance des thèmes xénophobes est d’autant plus significative qu’elle a été ressentie comme venant de tous bords. Sans donner une majorité à la coalition droite-extrême droite. Durant cette campagne, il y avait pour les électeurs de quoi se détourner, sinon se désespérer, assénés de promesses toutes aussi mirifiques et peu crédibles les unes que les autres. Quant à l’Union européenne, elle continue d’être ressentie comme étant le problème et non pas la solution.
La crise politique européenne continuera à piétiner tant que des solutions à son échelle imposant sa profonde reconfiguration ne résonneront pas, impliquant l’affirmation de ses dimensions sociale et fiscale, ainsi que l’apurement de son endettement.
[Les commentaires sont ouverts]
La zone euro fonctionne exactement conformément à sa finalité libérale : rendre la politique illisible et l’action politique impossible.
Rendre la politique illisible ? Non, bien pire !
La véritable finalité du néolibéralisme est d’en finir avec la politique, ou plus exactement de la soustraire définitivement aux mains des peuples. C’est le véritable sens des ni-gauche-ni-droite et autres fadaises du en-même-temps : imposer les choix politiques des dominants sous couvert de pragmatisme et de réalisme. Bref, essayer de camoufler le fameux TINA par trop brutal sous un beau rideau de fumée de neutralité politique.
En France, cette énième mutation du capitalisme a trouvé en Macron le parfait outil, alliage de la haute fonction publique maitrisant les rouages de l’État et du monde des affaires.
Ici comme ailleurs, il semble qu’à cette privation rampante de l’État, les peuples réagissent majoritairement en votant pour l’extrême-droite. À peine plus de 70 ans après la seconde GM « make chaos great again » !
Encore bravo comme dirait notre hôte.
Roberto,
« La véritable finalité du néolibéralisme est d’en finir avec la politique, ou plus exactement de la soustraire définitivement aux mains des peuples. »
Je plussoie.
Vous auriez écrit « du peuple » au lieu de « des peuples », je ne plussoierai que davantage.
Je vous avoue que j’aurais aimé écrire le peuple. Mais le peuple étant une construction politique et culturelle, force est d’avouer que celle-ci n’existe pour le moment qu’au niveau national et infranational, et non au niveau européen.
On peut même avancer que l’existence d’un peuple européen est en contradiction formelle avec les objectifs et fonctionnements d’une UE qui promeut la guerre fiscale et économique de tous contre tous. L’actuel président de la Commission européenne en est d’ailleurs le parfait symbole : comment se sentir solidaire du micro-état qu’il a dirigé pendant 18 ans, et qui en tant que paradis fiscal est un ennemi des peuples européens ?
Pour paraphraser Jaurès, on pourrait dire que l’idéologie néolibérale de l’Union porte en elle la xénophobie et le repli nationaliste, comme la nuée porte l’orage.
Et c’est bien là le problème insoluble de l’UE : plus qu’une construction économique et politique, elle est avant tout une construction idéologique qui comme telle se révèle quasiment impossible à réformer. Il n’y a qu’à écouter les réactions de la presse mainstream au lendemain des élections italiennes. Elle ne s’interroge quasiment pas, ou alors en mode mineur, sur la responsabilité de l’UE.
Difficile dès lors de corriger un vice de construction fondamental… qui n’existe pas !
Les populistes doivent comprendre, ce « système » qui les oppresse, qu’est ce que c’est ? C’est la capitalisme financier, qui les jette dans le chômage, et dans la destruction des services publics.
Ce ne sont ni les étrangers, ni les bureaucrates, ni les politiques…