C’est un fait établi, le monde des affaires n’aime pas la contradiction, les grandes entreprises de l’agrochimie n’aiment pas qu’on leur reproche de nuire à la santé des gens ou de détruire les écosystèmes.
Comme le prédit Paul Jorion, le jour où le marché dans sa mansuétude comprendra qu’il y va de son intérêt et de sa survie de soutenir dorénavant ce qui est bon pour le devenir de l’humanité donc de ses clients les consommateurs plutôt que ce qui concours à leur disparition, ce jour-là, un tout autre système devrait pouvoir se mettre en ordre de marche, dessinant un monde nouveau où ceux qui étaient « les premiers seront les derniers » (l’évangile selon Mathieu 19.13-20).
Parmi ceux qu’il faudrait louer et ça commence à se dire, citons le vers de terre, grand oublié de ces travailleurs de l’ombre qui œuvrent sous terre pour notre survie sur terre. L’annonce de sa disparition programmée par l’usage des engrais répandu sur les sols dans l’agriculture intensive a ramené à la réalité cette fuite en avant de l’industrie agricole française dopée au glyphosate, produit devenu indispensable à la filière, un danger pour ceux qui l’utilisent, un danger pour les nappes phréatiques.
La revue Science a depuis longtemps dénoncé les effets mortifères des néonicotinoïdes sur les abeilles et les bourdons affectant le système nerveux de ces deux pollinisateurs essentiels aux cultures. Non seulement les nouvelles conditions climatiques : gelées de printemps, sécheresses et chaleurs excessives perturbent la vie des ruches et le produit de leur activité mais le butinage des champs de colza ou des vergers soumis à ces néonicotinoïdes participe à l’effondrement de leurs colonies.
Ce n’est pas mieux pour la mésange, l’alouette des champs, la gorge blanche… Selon Benoit Fontaine, biologiste de conservation au Muséum national d’histoire naturelle de France, ce serait près d’un tiers des oiseaux des campagnes françaises qui manqueraient au dernier recensement. Là, à nouveau le principal fautif est indirectement la chimie qui en tuant les insectes (80% en 30 ans) affame ou tue par empoisonnement aussi leurs prédateurs : les oiseaux.
Ces périls ne sont pas prêts de disparaitre.
D’une part, les ventes de pesticides ont progressé de par le monde entre 2014 et 2019 malgré les campagnes existantes pour dénoncer leurs effets mortifères, de plus, selon l’Agence Européenne des produits chimiques, 654 entreprises de ce secteur ne respectent pas les protocoles d’enregistrement, d’évaluation et d’autorisation des produits chimiques censés protéger la santé et l’environnement, employant des substances de synthèse interdites, dangereuses. Comme on le voit, au niveau politique le rapport de force penche toujours du côté du monde des affaires.
Selon une étude de l’Université du Massachusetts ces multinationales de l’agrochimie sont en bonne place dans le classement des plus pollueurs de la planète, DuPont occupant la seconde place.
Selon une autre étude menée par deux chercheurs suisses, la présence de ces néonicotinoïdes resterait plus longtemps actifs dans les sols qu’on ne l’imaginait et se propagerait plus loin qu’on ne le pensait, emportés par le vent et par les eaux.
À suivre.