De la guerre commerciale à celle des monnaies

Les places boursières asiatiques puis européennes ont chuté suite à l’annonce de l’augmentation en septembre prochain de 10% des droits de douane américains portant sur 300 milliards de dollars d’importations chinoises. Les bourses mondiales ont terminé la semaine dans le rouge, les investisseurs cherchant refuge sur les marchés de l’or et des emprunts souverains, dont les taux ont battu de nouveaux records de faiblesse en Europe.

Les autorités chinoises ne sont pas pour leur part restées les bras croisés, alimentant ce repli dans le désordre. Les importations de soja américain vont cesser et la devise chinoise a eu toute latitude de se déprécier, passant sous la barre symbolique de sept yuans pour un dollar, un plus bas depuis 2008. Cette dévaluation compétitive qui ne dit pas son nom va amortir le choc en compensant d’un tiers la hausse de 6 % du prix moyen des produits chinois qui résultera de l’application de ces nouvelles taxes.

Côté américain, la précédente vague d’augmentation tarifaire n’aura rapporté qu’un peu plus de 20 milliards de dollars, moins que le plan d’aide aux agriculteurs de 28 milliards de dollars destiné à compenser leurs pertes. Certes, au bout du compte, le ralentissement de l’économie chinoise est indéniable, mais ce que la Chine a perdu, les États-Unis ne l’ont pas forcément gagné : leur déficit avec la Chine ne s’est pas réduit, les exportations américaines en sa direction chutant.

Les nouvelles surtaxes pourraient toucher davantage que les précédentes une consommation importante contributrice à la croissance américaine. Les produits taxés sont des biens de grande consommation dont Oxford Economics évalue le surcoût annuel après hausse des taxes douanières à 200 dollars par ménage. Et ce sont les moins fortunés, qui consomment plus de biens importés, qui seront les plus touchés.

On comprend mieux les raisons qui ont conduit Donald Trump à limiter à 10% son augmentation des droits de douane. Certes, il doit garder des munitions pour la suite de ses opérations, mais il doit surtout tenir compte des effets de ses mesures sur les consommateurs et les entreprises américaines.

Le lait qui bout déborde de la casserole. En prévision, le Japon qui est coutumier du fait pourrait vite être atteint si Donald Trump parvenait à ses fins et si le dollar baissait par rapport au yen. Yoshiki Takeuchi, le vice-ministre des Finances en charge des affaires internationales, a laissé planer la menace d’une intervention sur le marché des changes si une dépréciation du dollar, qu’il n’a pas nommé, venait à nuire à son économie fortement exportatrice, un contexte prévu par les conclusions des G7 et G20 derrière lesquelles il s’est abrité.

Cela confirme que de la guerre commerciale à la guerre des changes, il n’y a qu’un petit pas à franchir et que c’est chose faite. Il ne suffit pas de condamner les dévaluations compétitives et les mouvements désordonnés des taux de change lors des réunions internationales pour les empêcher.

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