Le désarroi des banquiers centraux

« Nous sommes dans une période de faiblesse persistante et d’incertitude généralisée », a reconnu Mario Draghi lors de son dernier point de presse. Mais le désarroi manifeste qui s’est emparé des banquiers centraux, qui tiennent cet ultime rempart dans lequel tous les espoirs sont placés quand cela tourne mal, ne fait pas recette dans une actualité très mouvementée.

La Fed et la BCE ont viré de cap et interrompu la réduction de leurs « mesures accommodantes » devant l’accumulation des incertitudes. Prenant le risque de se trouver démunies si leur intervention grand format était à nouveau requise. Et seuls les incorrigibles veulent voir un ralentissement conjoncturel là où pointe le risque d’une récession.

Si les États-Unis ont réagi sous l’impulsion de Donald Trump et creusé d’avantage leur endettement tout en ne suscitant qu’un feu de paille, les autorités européennes sont engoncées dans des débats internes qui les paralysent. Et ce n’est pas seulement le poids de la dette publique qui est en cause. Si l’on y ajoute celle du secteur privé, la dette mondiale totale a grimpé à 230 % du PIB, selon Standard & Poor’s. Du côté des gouvernements, les moyens d’action sont limités, en dépit des taux bas du marché obligataire qui rendent la dette moins insoutenable.

Cette situation est d’autant plus préoccupante qu’un triple surprenant constat s’impose. Le retour d’une croissance affaiblie ne s’est pas accompagné par celle de l’inflation. L’accroissement de l’endettement n’a pas suscité la hausse des taux d’intérêt. Et l’arrivée des nouvelles technologies n’a pas induit une hausse de la productivité.

Le système financier a considérablement enflé, conséquence de l’essor des produits dérivés et également de la masse des liquidités déversées par les banques centrales, altérant son fonctionnement et suscitant des nouveaux périls cachés. Est-il inutile de souligner que les équations des politiques monétaires et budgétaires des modèles d’équilibre stochastique, prolongement de la théorie de l’équilibre général, n’en sortent pas indemnes ? Aujourd’hui on n’entend plus guère parler de ces modélisations…

Les réformes structurelles sont le nec le plus ultra de la pensée libérale qui y voit l’occasion de marquer des points en créant des faits accomplis. Mais plutôt que de se réfugier derrière la formule passe-partout, il serait préférable d’entrer dans le concret et d’inventorier les fragilités structurelles auxquelles il faut remédier. L’OCDE, qui ne passe pas pour un parangon de radicalisme, énumère pour sa part la montée des inégalités, la précarisation de l’emploi, la faiblesse de la productivité et le changement climatique.

C’est quand même fou que l’on en vienne à faire référence à l’OCDE !

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