La semaine des replâtrages sans avenir

À la veille d’un Conseil franco-allemand de la dernière chance de demain mardi, les dirigeants allemands et français sont toujours à la recherche d’un replâtrage de dernière minute de leur « feuille de route ». On ne se perdra pas dans les détails.

Mais, après avoir été poussés à se mettre d’accord sur une refonte a minima de la zone euro permettant à Emmanuel Macron de sauver les apparences, ils doivent désormais faire face à la grande confusion qui s’est généralisée à propos des réfugiés, chacun n’en faisant qu’à sa tête et Angela Merkel appelant en pure perte à une solution collective sur un terrain où elle est politiquement très vulnérable.

Faite d’atermoiements quand elle ne surprend pas son monde par des initiatives individuelles – l’arrêt de l’électronucléaire, l’ouverture des frontières aux réfugiés – la politique d’Angela Merkel a atteint ses limites, et l’Europe témoigne de manière exemplaire de son incapacité à résoudre collectivement les problèmes qu’elle rencontre.

L’arrivée au pouvoir de la Ligue italienne d’extrême-droite et l’ultimatum de la CSU bavaroise – révélant le mécontentement d’une grande partie des députés de la CDU – ont créé une situation inextricable. Et même si les dirigeants de la CSU accordent finalement à Angela Merkel les deux semaines avant le prochain sommet qu’elle réclame pour négocier un compromis, elle ne sera pas sortie d’affaire pour autant.

Afin de ne pas précipiter la chute de la coalition, le ministre de l’intérieur de la CSU Horst Seehofer pourrait en effet prendre un décret fermant les frontières aux réfugiés tout en décidant de surseoir à son exécution dans l’attente du sommet européen.

Devant le refus d’accueillir ceux qui sont enregistrés dans leur pays d’arrivés (les « dublinés ») et ceux qui s’y refusent (« les clandestins »), la chancelière voudrait négocier avec la Grèce et l’Italie qu’ils gardent les réfugiés sur leur sol, ce qui impliquerait de leur accorder des compensations sur les terrains brûlants de la dette et des contraintes budgétaires (1).

Alternativement, comme il est de plus en plus entendu, il pourrait être envisagé de créer des « centres » hors de l’Union où seraient regroupés et sélectionnés ceux qui pourraient ensuite bénéficier du droit d’asile. Parmi les pays visés pour les accueillir figurerait l’Albanie. Le défaut de cette belle construction est de renvoyer à un accord de répartition de ceux qui bénéficieront de l’asile, alors que l’Autriche, la Hongrie, la Pologne, la Slovaquie et la Tchéquie, rejettent toute solution obligatoire.

Afin de préparer le sommet et de mettre toutes les chances de son côté, Angela Merkel reçoit ce soir le nouveau président du Conseil italien Giuseppe Conte et voudrait organiser avant celui-ci une réunion informelle où seraient réunis l’Autriche, l’Italie et la Grèce afin de préparer le terrain.

Le renforcement massif de la surveillance des frontières et la redéfinition restrictive du droit d’asile au prétexte de son harmonisation seront probablement décidés lors du sommet du 28 juin, mais rien ne sera réglé et chaque pays sera amené à agir de son côté.

Placée devant la poussée prévisible de l’AfD en Bavière à l’automne lors des prochaines élections législatives régionales, la CSU ne s’en tiendra pas là. Ce qui conduit la presse allemande à s’interroger à propos d’une solution de rechange à l’actuelle coalition, si le conflit avec celle-ci perdurait comme probable. Il serait question que les Verts prennent sa place au sein d’une nouvelle coalition, créant une situation d’ouverture très relative à propos du renforcement ultérieur de la zone euro, car il y a besoin que les lignes bougent. Mais comment cela pourrait-il aller jusqu’à revenir sur le rejet de toutes les formes de mutualisation, bloquant tout renforcement substantiel de la zone euro ?

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(1) L’Eurogroupe doit poursuivre jeudi ses longues discussions à propos de l’allégement de la dette grecque. Le ministre allemand va-t-il donner dans ce contexte le signal d’un assouplissement ?

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