Billet invité.
Qui l’eût cru, la crise politique européenne atteint désormais l’Allemagne ! Aucun parti ne pouvant espérer disposer d’une majorité au Bundestag, une coalition va selon la tradition devoir être formée. Mais ni la reconduction de l’actuelle coalition ni la configuration d’une nouvelle ne vont de soi.
L’arrivé de Martin Schulz à la tête du SPD n’aura suscité qu’un feu de paille vite oublié dans les sondages électoraux, et le score de son parti ne cesse depuis de baisser pour, à six jours des élections, atteindre seulement 20% des suffrages, à dix-sept points de son concurrent historique. Sa campagne menée au centre et s’inscrivant dans le cadre du consensus ordo-libéral régnant est incriminée. L’électorat trouve ses aises dans la reconduction d’Angela Merkel.
Après 15 années passées au pouvoir en coalition avec la CDU-CSU, une cure d’opposition pourrait être tentée pour se refaire une santé. À sa manière, le SPD connait la crise que toute la social-démocratie européenne subit, exception faite du Labour et du Parti socialiste portugais.
Longtemps partenaires de la CDU-CSU, les libéraux-démocrates du FDP avaient disparu du parlement en 2013, faute d’avoir obtenu un minimum de 5% des voix, mais ils sont désormais crédités de 8 à 10% des suffrages en fin de semaine. Ce qui les conduit à poser sans attendre, piaffant pour leur retour au pouvoir, les conditions de leur participation à une éventuelle coalition. Tournant radicalement le dos à leur fibre pro-européenne d’antan, les libéraux-démocrates sont aujourd’hui farouchement opposés aux propositions d’intégration budgétaires d’Emmanuel Macron en raison des transferts financiers qu’elles impliqueraient. Pis, ils réclament le poste de ministre des finances occupé par Wolfgang Schäuble depuis 2009, mais c’est une position de négociation.
Cela n’empêche pas la presse allemande de bruisser à propos de la constitution d’une coalition regroupant les Verts avec le FDP, sous le nom de coalition Jamaïque en raison des couleurs du drapeau jamaïcain et des partis y participant. Bien que la participation des Verts se heurte à leur volonté d’obtenir l’interdiction de la motorisation diesel en 2030, suscitant la farouche opposition de la CSU – BMW et Audi étant chez eux en Bavière – mais aussi du FDP. La négociation d’une coalition CDU-CSU, FDP et Verts pourrait prendre quelque temps…
En raison de sa portée symbolique, la surprise de ces élections pourrait provenir du parti d’extrême-droite AfD, qui devrait entrer au Bundestag étant crédité de 8% des intentions de vote, les sondeurs ayant du mal à les mesurer.
Quoi qu’il en soit, le tour que prennent les élections allemandes ne se révèle pas favorable à Emmanuel Macron.