Billet invité.
Pendant que Donald Trump joue les matamores sur la scène internationale dans le but manifeste de faire oublier à ses électeurs ses récents échecs, non sans risque prononcé de dérapage, les modalités de la déréglementation financière destinée à dynamiser l’activité économique sur le front intérieur alimentent des débats.
La démission à la mi-avril de Daniel Tarrulo de son poste de gouverneur de la Fed, plus spécialement en charge de la régulation financière, a laissé le champ libre à ceux qui veulent revenir en arrière. Il était également le représentant de la Fed au Conseil de stabilité financier (dont l’acronyme anglais est FSB), qui regroupe les régulateurs du monde entier et a piloté celui-ci dans ses grandes lignes. Dans le même temps, Janet Yellen, dont le mandat de présidente de la Fed arrive à son terme en 2018, faisait publiquement état « d’une forme de menace [qui] pèse sur notre indépendance », en référence à des propositions de loi déposées par des élus républicains du Congrès ayant en commun de restreindre les marges de manœuvre de la Fed.
Sous les auspices de Steven Mnuchin, conseiller de Donald Trump et secrétaire au Trésor, quel chemin pourrait emprunter la dérégulation financière ? L’ancien dirigeant de Goldman Sachs s’est récemment dit favorable à un « Glass-Steagall Act du 21e siècle », du nom de la loi de séparation des activités bancaires datant de 1933 qui avait été abrogée sous Clinton en 1999, dont une version a depuis ressuscité sous le nom de règlementation Volcker. Sans donner plus de précisions sur les modalités de séparation entre les banques de dépôts et d’investissement qu’il préconise dans un domaine où les détails ont toute leur importance, laissant volontairement toutes les portes ouvertes.
Une telle initiative, si elle était poursuivie, représenterait un camouflage rêvé pour tout assouplissement simultané des normes de fonds propres en termes de volume et de liquidité, la réforme que les banques d’investissement attendent fiévreusement afin de débrider leurs activités spéculatives. Un tel arbitrage serait dans l’esprit de la règlementation de Paul Volcker, dont l’argument massue a toujours consisté à dire : « si des banques veulent jouer au casino, ce doit être à leurs risques et périls », écartant par la même toute restriction sur ces activités.
La réforme Vickers adoptée au Royaume Uni pourrait servir de modèle, selon une version étudiée par l’un des régulateurs américain, Thomas Hoenig du Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC). Celle-ci laisse les mains libres à tous les établissements bancaires à condition de ne pas avoir accès à un soutien public ; elle édifie bien une barrière entre les activités d’investissement et de dépôt, mais elle permet que les structures correspondantes soient chapeautées par une même holding.
Même limitées, ces entraves ne ravissent pas les grandes banques américaines, laissant peu d’espoir que Donald Trump bénéficie sur ce chapitre également de l’oreille attentive d’un Congrès qui va ouvrir le dossier de sa réforme fiscale, bien que le retour du Glass-Steagall Act figure en bonne place dans le programme républicain.
Un autre spectre s’annonce interférer au Congrès, celui de l’endettement public qui ne cesse de progresser. Son plafond va une nouvelle fois être défoncé, ce qui implique l’autorisation préalable du Congrès. Dans quelles proportions ? Cela va dépendre de la manière dont Donald Trump va parvenir à financer son programme d’investissement et de relance, qui comprend notamment une forte progression des crédits militaires ainsi que des mesures de réduction des impôts et taxes, tout en maintenant les dépenses d’Obamacare qu’il n’est pas parvenu à abroger.
Les recettes fiscales générées par les nouvelles activités économiques escomptées suffiront-elles, si l’on en croit Steven Mnuchin qui assure qu’elles « génèrent beaucoup de revenus », faute d’une taxe sur les importations dont l’adoption s’éloigne ? Prudent et tirant les leçons du passage d’Obamacare devant le Congrès, le secrétaire au Trésor a par ailleurs annoncé que l’adoption de la réforme fiscale serait repoussée à la fin de l’année…
Décidément, tout patine !