Billet invité.
En dépit des incertitudes qui pèsent sur le résultat des élections de cette année, les grandes manœuvres post-électorales ont commencé. Le sort qui va être réservé à la Grèce ne peut pas attendre, tandis que d’autres projets prennent tournure.
Une sortie grecque de l’union monétaire revient sur le tapis. Klaus Regling, le directeur du Mécanisme européen de stabilité (MES), a fait savoir qu’il était exclu de verser la tranche attendue de l’aide européenne si le FMI n’était partie prenante, y compris financièrement, du 3ème plan de sauvetage. Ce qui pratiquement laisse la décision à Donald Trump, les États-Unis ayant une influence prépondérante en son sein.
On en saura plus lundi prochain, date de la prochaine réunion du FMI. Elle interviendra dans le contexte de la mise en cause de l’Allemagne par le nouveau responsable du National Trade Council américain, Peter Navarro, qui l’accuse de manipuler sa monnaie pour la dévaluer en accumulant des surplus commerciaux.
Vaille que vaille, le gouvernement grec est à la recherche d’un compromis portant sur son excédent budgétaire obligatoire des années à venir, afin de desserrer l’étau des mesures d’austérité budgétaire qui sont censées aider à le dégager. Mais, parallèlement, le porte-parole du Parlement Nikos Xydakis a lancé un ballon d’essai en expliquant qu’une sortie de l’euro ne devait pas être une question tabou. Ce qui pourrait être le prélude à un référendum à ce sujet. Faute du versement européen attendu, la Grèce fera défaut en juillet prochain, enclenchant le mécanisme de sa sortie.
Afin de sauver l’Italie, dont le système bancaire contient à lui seul un quart des prêts toxiques identifiés en Europe, une autre idée a opportunément surgit, venant d’Andrea Enria, le président de l’Autorité bancaire européenne (EBA). Celle-ci est sur la sellette, sa fusion avec son homologue pour la zone euro au sein de la BCE faisant partie des options envisagées dans le cadre du Brexit, son déménagement de Londres étant en tout état de cause inévitable.
Afin d’en finir avec la poursuite de la crise du système bancaire européen qui a plus de mille milliards d’euros de prêts toxiques inscrits au bilan, il propose de créer un fonds qui les achèterait aux banques afin de les soulager. Dans sa conception, ces prêts non performants seraient achetés à leur « valeur économique réelle », qui serait déterminée par ce fonds adossé à des fonds publics, après examen détaillé de ceux-ci (selon une méthode non précisée). Afin de rendre acceptable ce schéma, Andrea Enria propose que les pertes que le fonds pourrait encourir en revendant les actifs acquis – s’il trouve preneur -seraient répercutés sur les banques qui les auraient vendus.
Ce plan a l’avantage d’exclure toute mutualisation des pertes – proscrites par le gouvernement allemand – et de constituer une solution d’attente indéfinie s’il n’y a pas de marché pour vendre ces actifs à un prix supérieur ou égal à celui de leur achat. S’il devait être adopté, il serait une variante de la politique qui a jusqu’à maintenant prévalu et qui a consisté à planquer les pertes sous le tapis, à la seule différence que l’on connaitrait maintenant le montant admis du désastre…
Klaus Regling, dont les interventions sont désormais à suivre de près étant donné le rôle grandissant que le gouvernement allemand attribue au MES – devenir un FMI européen – a bien accueilli la proposition de l’EBA, précisant que le fonds proposé pourrait accueillir 250 milliards d’euros de prêts toxiques, sans préciser s’il s’agit de leur valeur nominale ou de marché. Il a ajouté que « une certaine contribution du secteur public serait probablement nécessaire », remarque qui consacre le détournement de la règlementation de l’union bancaire.
Que l’on vienne après réfuter l’idée que le démantèlement de l’Europe progresse !