Billet invité.
Les marges de manœuvre de la Commission se rétrécissent. Quatre pays sont à des titres et degrés divers hors des clous, impliquant une réaction qui ne vient pas : l’Espagne et la France, l’Italie et le Portugal. Même si leur camp n’est pas constitué, tous lâchent la bride et sont amenés à se soutenir mutuellement. Suspecte aux yeux des dirigeants allemands et hollandais, les plus intransigeants censeurs, la Commission va devoir trouver une position.
Dans l’immédiat, toute décision de sanctions contre l’Espagne et le Portugal a été repoussée à la réunion de l’Ecofin du 12 juillet prochain. Mais Antonio Costa, le premier ministre portugais, a profité du congrès du parti socialiste dont il est membre pour avancer ses pions. Prenant l’opposition de droite à contre-pied, il a réclamé un vote unanime du parlement pour s’opposer à d’éventuelles sanctions, soutenu par le Bloc de gauche et le Parti communiste, et appuyé par le président de la République Marcello Rebelo de Sousa. S’il parvient à ses fins, il faudra s’opposer à la représentation nationale pour en décider, un symbole qui peut inciter à réfléchir. Antonio Costa a également reçu le soutien du président du Parlement européen, Martin Schulz, qui depuis la tribune du congrès socialiste où il était invité s’est déclaré opposé à toute sanction.
Les derniers sondages espagnols convergent à propos des résultats des élections du 26 juin prochain. La coalition de la Gauche unie et de Podemos devrait cette fois-ci devancer en voix le PSOE, en seconde position derrière le Parti populaire, et voir Ciudadanos arriver bon dernier. En termes de sièges, ce pourrait être encore plus favorable à la coalition de gauche sans cependant lui donner la majorité aux Cortes. Toutefois, le multipartisme réaffirmé et le PSOE rétrogradé, il n’en ressortirait toujours pas de solution gouvernementale, la convocation de nouvelles élections étant difficilement envisageable. Compliquant sa position, la Commission continuera de ne pas disposer d’un interlocuteur incontestable avec lequel elle pourra manœuvrer, ou sur lequel exercer ses pressions. Selon El Pais, les gouvernements français et italien seraient opposés à toute sanction contre l’Espagne et le Portugal.
Le premier tour des élections municipales italiennes ne peut pas préfigurer les élections législatives de 2018, mais leur résultat n’en est pas moins significatif. À Rome où c’était prévu, mais aussi à Turin où cela ne l’était pas, le parti démocrate de Matteo Renzi est susceptible de perdre au second tour, au profit dans les deux cas du Mouvement des 5 étoiles dont la position à propos de l’appartenance de l’Italie à la zone euro oscille.
Le président de l’Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, a vendredi dernier appelé la Commission à se montrer plus ferme avec la France, estimant que la zone euro y jouait sa « crédibilité ». « Si c’est en votre faveur que la Commission ferme les yeux, il faut que vous vous montriez assez prudent… Si nous fermons les yeux dans toutes les directions, nous aurons une union monétaire aveugle », a-t-il ajouté lors d’un entretien avec de grands quotidiens européens….
Il réagissait ainsi aux propos de Jean-Claude Juncker qui justifiait d’accorder des dérogations à la France en matière budgétaire « parce que c’est la France », et « qu’on ne peut pas appliquer le pacte de stabilité aveuglément ». Jeroen Dijsselbloem a annoncé la suite, une fois le referendum au Royaume-Uni passé : « Comment voulez-vous redynamiser l’union monétaire, après le vote britannique par exemple, si vous traitez ainsi les règles existantes ? Personnellement, je trouve que c’est très inquiétant. Nous avons besoin de clarté ». On voit poindre le projet consistant à retirer à la Commission son rôle de gardienne du Temple. Pierre Moscovici, qui connaît son métier de politicien, a immédiatement réagi : « Nous serons vigilants, nous serons exigeants, et il n’y a pas d’autre alternative que d’être en-dessous de 3% en 2017 ».
Il y a du sport dans les coulisses !