Billet invité.
Comment sauver Schengen s’interrogent nos édiles ? Les réponses continuent de partir dans tous les sens, une fois constaté le peu de temps qui reste pour répondre à cette question afin de ne pas entériner sa mort clinique. En attendant, ils ne parviennent toujours à rassembler les trois milliards d’euros promis aux autorités turques, en contrepartie desquels des mesures réduisant l’arrivée de l’exode en Grèce devraient être entreprises.
Les ministres de l’intérieur européens se retrouvent aujourd’hui à Amsterdam afin d’inaugurer une série de consultations qui promettent d’être houleuses, dans le but de préparer le sommet du 18 février prochain, que l’on peut sans emphase qualifier de réunion de la dernière chance. Les autorités européennes sont en effet placées devant deux échéances : celle de l’arrivée fin mars du printemps, signal de rebond de l’exode, et celle en mai de la fin de la période de réinstallation provisoire des contrôles aux frontières allemandes et autrichienne, en application des accords de Dublin. Les deux vont venir très vite.
Quelles solutions se présentent ? La première est comme de coutume de gagner du temps sans rien régler et part favorite. Une procédure lourde existe qui permettrait, une fois dûment constaté l’échec prolongé des contrôles des frontières de Schengen, de poursuivre ceux-ci à ses frontières intérieures pendant deux ans. Une discussion porte sur la possibilité ou non de suspendre l’appartenance de la Grèce à Schengen durant cette période.
Une autre consisterait à faire sans attendre de la Grèce le terminus de l’exode en contrôlant ses frontières avec la Macédoine et la Bulgarie depuis ces deux pays. Dans l’intention de décourager les réfugiés de continuer à pénétrer en Grèce, une fois la Route des Balkans fermée. C’est l’autre menace qui plane sur le gouvernement grec, qui tente de ne pas devenir ce cul-de-sac et d’en supporter ensuite la charge dans un pays déjà dévasté par les mesures qui lui ont été imposées. Jean-Claude Juncker a – selon le Financial Times qui l’a lue – adressé une lettre au président slovène, qui en est vigoureusement partisan, afin de l’en féliciter.
D’une députée de la CDU allemande, Julia Klockner, émerge, encore imprécise, une autre issue, qui consisterait – une fois l’exode ralenti, et c’est tout le problème – à créer à la frontière allemande de vastes camps où les réfugiés seraient recueillis. Mais cette solution, qui a précédemment été repoussée par le SPD, supposerait l’adoption de quotas de réfugiés admissibles, sur le modèle envisagé par l’Autriche qui les plafonnerait à 37.500 par an. Ce sont des dispositions contraires aux Conventions internationales, le droit d’asile ne pouvant être soumis à un quota car il dépend des menaces qui pèsent sur quiconque demande à en bénéficier. Mais est-on dorénavant à cela près ?
Rien de bon pour les réfugiés ne va sortir de ces conciliabules tendus où l’on se paye beaucoup de mots, l’ambiance ayant tourné au glauque. A l’image des dispositions prises à l’encontre des réfugiés de Cardiff, au Pays de Galles, où ils doivent porter un bracelet rouge scellé très visible afin d’avoir accès aux distributions de nourriture. La mesure a été aujourd’hui annulée, en raison du tollé soulevé. Seule bonne nouvelle, un groupe d’universitaires d’Oxford, Princeton, Harvard, Cornell et de l’université de Copenhague recommande que le prix Nobel de la Paix soit accordé aux volontaires et populations des îles grecques qui accueillent sans faillir les réfugiés et leur donnent en plus d’un soutien matériel de base un peu d’humanité. Une pétition en lignea déjà par ailleurs recueilli plus de 300.000 signatures.