Billet invité.
Tous les deux à leur place, le PSOE et Podemos tiennent en main la clé des élections législatives espagnoles. Le premier peut choisir entre la participation à une grande coalition avec le Partido Popular (ou de s’abstenir afin de permettre la constitution d’un gouvernement minoritaire), ou bien rechercher une issue à la portugaise en trouvant des alliances sur sa gauche, avec Podemos en premier lieu. Celui-ci peut également jouer cette carte, ou bien favoriser la tenue de nouvelles élections une fois l’impasse constatée.
Dans le cas du PSOE, qui a déjà annoncé s’opposer au retour du PP au pouvoir, un revirement est peu vraisemblable étant donné sa vulnérabilité électorale vis à vis de Podemos que cela accentuerait. Il s’en est fallu de peu pour que ce dernier ravisse la seconde place en termes de voix et le dépasse, et cela fait réfléchir ses dirigeants qui ont en tête le syndrome du Pasok grec. D’autant que sa progression au détriment du PSOE est plus forte dans les grandes villes conquises par les Marées, avec lesquelles il a fait alliance en Catalogne, en Galice et à Valence. Podemos a acquis un ancrage social et électoral. Dans sa volonté de « prendre le ciel d’assaut », ce dernier est placé devant un problème. S’il n’y parvient pas tout seul, une alliance avec le PSOE sur le modèle de celles du lendemain des élections régionales est-elle un marche-pied envisageable ? La question mérite réflexion, car comment poursuivre au mieux la sortie bien entamée de la transition post-franquiste et entrer dans une ère nouvelle ?
Dans le but de créer des faits accomplis, Podemos a déjà posé comme préalable à tout pacte politique l’adoption d’une nouvelle loi électorale ainsi que l’inscription dans la constitution des droits au logement, à la santé et à l’éducation. Il y a ajouté le droit à l’autodétermination des régions qui le souhaitent dans le cadre d’une Espagne plurinationale, la dépolitisation de l’appareil judiciaire et l’adoption de règles faisant obstacle aux aller-retour des politiciens dans les entreprises. Un tel programme n’a rien de révolutionnaire, mais celui qui revendiquait le pain et la paix en 1917 ne l’était pas non plus…
Après la Grèce, qui continue de tenir en haleine malgré tout, et le Portugal dont le nouveau gouvernement fait ses premières armes, l’Espagne est en train de trouver son chemin. C’est le moment qu’a choisi Matteo Renzi, plaidant pour sa paroisse et croisant désormais ouvertement le fer avec le gouvernement allemand, pour mettre en garde celui-ci à propos de la poursuite d’une politique d’austérité qui attise les flammes du « populisme » et inflige des revers aux gouvernements en place.
Très mal en point, minée par ses crises de toutes natures, l’Union européenne n’a toujours pas de plan B, la faute étant à ses dirigeants pusillanimes. Mais la relève qui a été bloquée se renforce malgré tout.