Billet invité.
La moitié des États fédérés américains refusent d’accueillir des réfugiés syriens, adoptant la position défendue par le parti républicain et le candidat Donald Trump. De quoi conforter de loin les pays européens qui ont adopté la même attitude, sans toujours le proclamer. Le renforcement des frontières de Schengen afin d’en réduire le flux dans un premier temps est à la base du discours ambiant, dans le but d’éviter le retour des frontières intérieures et son effondrement.
Qui accepte les réfugiés en Europe ? Trois chiffres résument la situation : 964.574 d’entre eux ont été enregistrés depuis le début de l’année en Allemagne, et environ 160 ont été « relocalisés » dans le cadre d’un plan européen concernant 160.000, qui ne démarre pas. Parce qu’il faut un coupable à cet gigantesque échec, le gouvernement grec a été accusé de ne pas filtrer les bénéficiaires potentiels du droit d’asile pour les « relocalisés », mais celui-ci a fait valoir l’extrême faiblesse des offres qui lui étaient transmises.
Se réfugiant derrière la réaction de leur opinion publique, les deux ministres de l’intérieur allemand et français, ont dans un communiqué commun résumé leur pensée : « Parce que nous voulons préserver Schengen, nous devons d’urgence continuer à améliorer la protection des frontières extérieures de l’Union européenne et le régime d’asile européen commun ». Mais de ce dernier il n’est plus ensuite question, le renforcement des moyens et des prérogatives de l’agence Frontex faisant l’essentiel des propositions.
La concrétisation du « plan d’action » proposé à la Turquie étant incertaine, l’objectif est de s’assurer le contrôle de la Route des Balkans en renforçant avec Frontex la frontière de la Grèce avec la Macédoine. Ce que le gouvernement grec a finalement accepté devant la menace d’être « suspendu » de Schengen. Il cherche à obtenir une application assouplie des mesures
contraignantes de son troisième plan de sauvetage, en contrepartie de la
création des centres de rétention dont la mise en place rapide est
réclamée. C’est pourquoi il voudrait écarter le FMI de ce plan de sauvetage afin que l’affaire se règle au sein de la famille européenne par un marché global.
Contraindre la Grèce à devenir une zone tampon et à gérer le difficile retour des réfugiés refoulés ne règle pas tout. Non seulement parce que l’exode se poursuit, même si l’hiver le ralentit, mais parce que la Suède et l’Allemagne voudraient « relocaliser » des dizaines de milliers de réfugiés dans les autres pays européens, afin de répartir la charge qu’ils représentent. Dans le contexte politique actuel, on devine l’impact ! Mais il n’en sera même pas fini ainsi, car il avait été décidé en juillet dernier d’accueillir directement de Turquie et du Liban 20.000 réfugiés. Et la Commission voulait porter à 200.000 ce nombre, afin de suivre les recommandations du Haut Commissariat aux Réfugiés de l’ONU (HCR).
En prélude au sommet de ce week-end qui va entre autres traiter de la question des réfugiés dans un contexte très sécuritaire, deux nouveaux naufrages en mer Egée ont causé dans un cas la noyade de 11 d’entre eux dont 5 enfants, et de six enfants dans l’autre. Devant la faiblesse des moyens de sauvetage déployés, et faute d’obtenir qu’un passage sécurisé et légal soit mis en place pour les réfugiés comme ils le réclament, Médecins sans frontières et Greenpeace ont fin novembre mis à la mer à Lesbos, principal point d’entrée en Grèce, trois bateaux pneumatiques rigides, qui vont être suivis d’autres, afin de les secourir. Une initiative semble-t-il hors de portée des plus hautes autorités européennes.