Billet invité.
Une ligne de défense s’organise afin de contenir les réfugiés, en attendant que les Turcs bouclent leur frontière maritime avec la Grèce. Les Bulgares poursuivent l’installation d’une clôture munie de caméras et de détecteurs de mouvement le long de leur frontière avec la Turquie, et le gouvernement grec s’est finalement résolu à confier à l’agence européenne Frontex « l’identification et l’enregistrement » des réfugiés à la frontière avec la Macédoine, devant la menace d’être suspendu de Schengen.
En réaction à l’évocation d’un mini-Schengen, le mot d’ordre des ministres de l’intérieur réunis aujourd’hui à Bruxelles a été de sauver Schengen à tout prix en arrondissant les angles nécessaires ! La vive réaction du « Groupe de Visegrád » à l’hypothèse d’un mini-Schengen a été entendue, ses membres – la Hongrie, la Pologne, la République tchèque et la Slovaquie – craignant d’en être exclus. Bien que restant sous le coude, la possibilité de rétablir durant deux années au lieu de six mois des contrôles aux frontières intérieures de Schengen n’a pas été décidée lors de la réunion, car elle symbolisait un peu trop la suspension de Schengen.
Mais tout reste à faire, l’accent étant mis sur le programme de « relocalisation » des réfugiés qui est en panne et fait l’objet de deux recours devant la justice européenne. 295 places ont seulement été offertes à ce jour, selon le ministre grec à la politique migratoire Ioánnis Mouzálas. Un nombre dérisoire comparé aux 800.000 réfugiés que l’Allemagne avait prévu d’accueillir, et qui est déjà « largement dépassé » selon Thomas de Maizière, le ministre de l’intérieur. On saura lundi de combien. Et le projet d’Angela Merkel de déplafonner ce programme de répartition n’étant plus évoqué, les Afghans risquent fort d’en faire les frais.
Dans le même ordre d’idée, la porte est ouverte au durcissement des conditions mises pour accorder l’asile. Le ministre a en effet préconisé de revenir « au traitement individuel de tous les réfugiés et demandeurs d’asile, quel que soit leur pays d’origine, y compris les Syriens », et non plus de l’accorder sur le seul critère de la nationalité.
Sur la défensive devant les mises en cause qui se sont multipliées, Ioánnis Mouzálas a annoncé que la Grèce demandait l’activation du mécanisme européen de protection civile, résignée à l’idée de devoir accueillir les réfugiés qui seront refoulés par Frontex à la frontière avec la Macédoine, alors qu’ils continuent d’arriver dans les îles et sont de nombreuses nationalités. Dépendant par ailleurs de la bonne volonté des autorités européennes, le gouvernement grec n’a pas le choix.
Les considérations humanitaires sont de plus en plus absentes. Donald Tusk, le président du conseil européen, a préconisé de conserver durant dix-huit mois « sous contrôle » les réfugiés, le temps de s’assurer de leur identité. Le gouvernement hongrois met encore moins de gants, publiant dans la presse nationale des placards pleine page mentionnant « les quotas augmentent la menace terroriste ! », « un immigré illégal arrive en Europe toutes les douze secondes en moyenne » ou « nous ne savons pas combien de terroristes se cachent parmi eux »…