Billet invité.
Dans la série, cela ne tourne pas comme avant, trois évènements viennent de prendre la succession de la crise chinoise. A première vue, ils pourraient sembler n’avoir que peu de rapports, mais pourtant ils conjuguent leurs effets…
William Dudley, le président de la Fed de New York, s’est hier estimé « moins convaincu » par la nécessité d’une hausse du taux de la Fed, ce sujet qui est devenu un véritable serpent de mer aux États-Unis et qui fait l’objet de tant d’hésitations en raison d’impératifs contradictoires. Septembre était donné pour certain, mais ce n’est plus le cas. A l’appui de ce revirement, William Dudley fait état de la baisse de la croissance chinoise, de la chute des prix des matières premières, des fortes tensions dans les marchés émergents qui seraient encore accentués, et de la volatilité des marchés qui prend des proportions inquiétantes, en raison de l’ampleur des masses financières mis en mouvement. Tous concurrent pour freiner la relance américaine, qui n’est pas solidement établie comme les résultats successifs inégaux des derniers trimestres l’ont montré. Remonter les taux n’est donc pas opportun.
Peter Praet, l’économiste en chef de la BCE, tire des mêmes constatations de son collègue américain une autre conclusion : l’Institut de Francfort serait en train de perdre son pari et de rater sa lutte contre les pressions déflationnistes. La confirmation d’une telle éventualité pourrait avoir comme conséquence une relance du programme de création monétaire, initialement prévu pour se terminer en septembre 2016. Mario Draghi en avait d’ailleurs évoqué la possibilité, liant l’arrêt du programme à ses résultats et restant à ce sujet dans le flou. Quoiqu’il en soit, il s’avère que la pression déflationniste reste soutenue en Europe, comme aux États-Unis.
L’accroissement des échanges commerciaux internationaux serait-il terminé ? Le Netherlands Bureau for Economic Policy Analysis, qui a la charge d’en suivre la progression, a enregistré une baisse de 0,5% du volume des échanges commerciaux internationaux au second trimestre 2015 par rapport au premier, après avoir révisé de -1,5% les chiffres de ce dernier. Il faut remonter à 2009 et aux conséquences de l’éclatement de la crise financière pour retrouver une contraction de cette ampleur. Selon les spécialistes néerlandais, cela pourrait signifier que le temps d’une croissance du commerce mondiale double de celle de l’économie est révolue et qu’une page est tournée.
Un tel retournement ne résulterait pas uniquement de facteurs conjoncturels, mais aussi de causes structurelles. Il refléterait les réorientations en faveur du développement de leurs marchés intérieures de grandes puissances exportatrices comme la Chine, et l’avènement de la « stagnation séculaire » promise par Lawrence Summers. Tel serait en effet le résultat de l’interaction de la faible croissance de chacune des régions du monde, ce nouvel effet de la mondialisation. En attendant d’autres découvertes qui ne sauraient manquer.
Sans parvenir à remettre le système sur ses pieds tout en générant de lourds effets collatéraux, les grandes banques centrales continuent de jouer un rôle déterminant d’assistanat. La menace déflationniste continue à se faire insistante et la croissance d’être défaillante. Désormais, le moteur de la mondialisation a calé. La dette mondiale continue de s’accroître plus vite que l’économie ne croit. Faut-il faire un dessin ?