Billet invité.
Christine Lagarde avait utilisé le mot et Barack Obama l’a repris en appelant la Grèce et ses créanciers à faire preuve de flexibilité. Mais on la cherche toujours du côté de ces derniers. Le Wall Street Journal a confirmé que Jean-Claude Juncker avait proposé la semaine dernière au gouvernement grec de prolonger de neuf mois, jusqu’à mars 2016, l’actuel plan de sauvetage qui l’a déjà été à deux reprises, et de débloquer l’utilisation des 10,9 milliards d’euros inutilisés destinés aux banques afin qu’il dispose des ressources nécessaires pour faire face à ses échéances de remboursement. Mais c’était sous condition d’accepter les mesures exigées par les créanciers à la suite de leur mini-sommet de lundi de la semaine dernière et ce projet a capoté, suscitant une réaction de dépit de son auteur.
Ce nouvel épisode illustre la fermeture des créanciers, qui se refusent à tout assouplissement au nom d’une pseudo rigueur financière masquant leur intention de faire plier le gouvernement grec, afin qu’il perdre sa crédibilité aux yeux des électeurs et devienne plus complaisant ou qu’un autre lui succède. Ce n’est pas parti pour se concrétiser, la menace étant au contraire brandie par des membres du gouvernement grec d’un retour vers les électeurs en cas d’échec des négociations, alors qu’un nouveau sondage donne Syriza très loin en tête devant Nouvelle Démocratie (45% contre 21,4%). Quel sens cela aurait-il par ailleurs d’accorder sous des conditions inchangées – et rejetées – un délai de neuf mois ? Anticiper dès maintenant que le second round de négociation sera aussi long et difficile que le premier ?
Une nouveauté est intervenue avec la suggestion du président polonais du Conseil européen, Donald Tusk, reprise ensuite par François Hollande, qui a proposé de reprendre la négociation sur les mesures rejetées en y substituant de nouvelles, à condition que leur impact financier soit équivalent. C’est cette balle qui a été saisie par le gouvernement grec, qui a immédiatement envoyé des émissaires de poids rechercher à Bruxelles des points de convergence, dans la perspective d’une nouvelle rencontre d’Alexis Tsipras avec Angela Merkel et François Hollande demain mercredi. De source européenne, l’annonce était faite dès ce matin que de nouvelles propositions dont le détail n’est pas connu avaient été reçues et qu’elles étaient déjà à l’étude à Bruxelles. Le journal grec Kathimerini fait état de nouvelles mesures soigneusement pesées sur les sujets brûlants : l’augmentation de la TVA et les retraites ainsi que sur l’acceptation de l’objectif d’excédent budgétaire de 1% pour cette année. La proposition de Yanis Varoufakis d’obtenir un prêt du Mécanisme européen de stabilité (MES) afin de rembourser la BCE et cet été et de débloquer le remboursement des intérêts perçus par la BCE sur les titres grecs serait à nouveau sur la table.
Dans une interview à Corriere della Sera, Alexis Tsipras a une fois de plus estimé ce matin qu’un accord était « très proche », mais qu’il était « inconcevable qu’après cinq ans d’austérité, on nous demande de réduire les retraites les plus faibles et les allocations qui concernent les citoyens les plus pauvres ». Faisant valoir que « notre objectif est que les mesures tiennent compte du principe de redistribution et de justice sociale », il s’est ensuite interrogé : « Si les dirigeants européens ne peuvent pas régler un problème comme celui de la Grèce, qui représente 2% de son économie, quelle sera la réaction des marchés pour les pays qui affrontent des problèmes beaucoup plus grands, comme l’Espagne ou l’Italie qui a une dette publique de 2.000 milliards d’euros ? ».