Billet invité.
Que va-t-il résulter du mini-sommet sur la Grèce qui s’est terminé dans la nuit de jeudi à vendredi ? De la souplesse, qui donnera des marges de manœuvre au gouvernement grec, ou l’éclatement de Syriza et la chute d’un gouvernement forcé à avaliser des mesures d’austérité ? Quand on entend François Hollande se donner le beau rôle en affirmant : « que le gouvernement grec fasse des efforts pour les pauvres, ce n’est pas ça qui me choque, mais ce qu’on demande à la Grèce c’est qu’elle demande aux plus riches de payer des impôts », on s’interroge sur la politique poursuivie par les dirigeants européens, ayant retenu qu’ils formulaient jusqu’à maintenant de toutes autres exigences…
La réponse ne devrait en tout état de cause pas tarder, puisque le gouvernement grec, qui vient de procéder à un nouveau remboursement au FMI et de bons du Trésor à court terme, est exsangue financièrement après avoir utilisé tous les expédients disponibles, et que le vice-Premier ministre Ioannis Dragasakis a reconnu pour la première fois « un problème de liquidité ». Athènes doit très rapidement fournir une liste de réformes validées au sortir du mini-sommet – selon Alexis Tsipras, elles ne comporteront pas de « mesures récessives » – et commencer à les appliquer avant que de premiers fonds ne soient débloqués, en toute dernière extrémité.
En attendant, le Parlement a adopté une nouvelle loi qui faisait partie des promesses électorales de Syriza. Elle permet aux contribuables et aux entreprises de régler en cent versements leurs arriérés d’impôts ou de cotisations sociales – qui représentent des dizaines de milliards d’euros – en bénéficiant d’une réduction sur les pénalités de retard. À nouveau, les députés de Nouvelle Démocratie et du Pasok se sont joints aux partis de la coalition gouvernementale pour l’approuver. La lutte contre la fraude et l’évasion fiscale va s’engager incessamment sous les auspices du ministère de la lutte contre la corruption, d’un conseil fiscal indépendant, de l’embauche de contrôleurs fiscaux et de l’adoption d’incitation pour les repentis fiscaux.
Deux à trois milliards d’euros seraient nécessaires pour attendre le versement de la dernière tranche du second plan de sauvetage, prévu pour la fin avril si tout se passe bien. En attendant, Angela Merkel a veillé à ce que toutes les portes soient fermées en repoussant à l’adoption de l’ensemble du paquet de réformes le versement par la BCE des intérêts perçus sur les titres obligataires grecs que la banque centrale détient, auparavant suspendu. Au titre de ses bonnes œuvres, Jean-Claude Juncker a toutefois découvert dans un recoin deux milliards d’euros de crédit structurels non dépensés au titre de 2015 et dont le gouvernement grec pourrait se servir, à condition que « cela ne renfloue pas les caisses de l’État grec ». Ils pourraient être utilisés « en faveur de la croissance et de la cohésion sociale », notamment « en réponse au problème massif du chômage des jeunes ».
Les cinq prochaines semaines vont être denses, si toutefois la première étape est franchie dans les dix jours à venir. Mais il restera le plat principal : la suite des opérations à la fin juin, avant les remboursements de la BCE de l’été, qui nécessiteront une nouvelle aide financière sous condition. Celle-ci, on a tendance à l’oublier, ne sert qu’à rembourser les prêts précédents sans diminuer l’endettement ni contribuer à la relance de son économie.
Le pays en récession, les objectifs d’excédents budgétaires primaires qui lui ont été impartis pour se désendetter sont absurdes. Il n’a pour l’instant été question que d’abaisser celui de 2015 – le temps étant venu de se rendre à l’évidence – et de maintenir ceux des années suivantes, qui sont l’expression achevée de l’irréalisme dans lequel les dirigeants européens baignent, car ils ne seront jamais atteints. Sous un nom ou sous un autre, un troisième plan de sauvetage va être mis en place, et on peut dès maintenant s’interroger : à quand le quatrième ?