Billet invité.
À Athènes, Antonis Samaras tente de grignoter des voix parlementaires et d’assurer la victoire de son poulain à la Présidence de la République, afin de reculer la perspective d’élections législatives anticipées gagnées par Syriza. Le troisième et dernier tour des élections à la présidence aura lieu le 29 décembre, mais les pointages ne lui sont toujours pas favorables. Deux épisodes de débauchage font déjà jaser, avec pour cible un député des Indépendants et le parti Dimar, le premier sous la forme la plus classique d’un achat de vote, un enregistrement non authentifié circulant. Le second à l’occasion d’une allocution télévisée, hier dimanche, au cours de laquelle le premier ministre a proposé aux députés d’avancer les élections législatives à la fin 2015, au lieu de juin 2016, ainsi qu’un élargissement du gouvernement, en contrepartie de leur soutien à son candidat à la présidence, Stavros Dimas. Il reste une semaine pour conclure !
Le gouvernement espagnol a plus de temps devant lui, mais l’échéance des législatives s’approche, et il s’affaire tout autant à leur préparation. Avec en toile de fond l’étrange compétition qui est engagée entre l’Espagne et le Portugal – dont le calendrier est similaire – pour savoir dans lequel des deux pays les rapports entre l’argent et le monde de la politique sont les plus malsains. Dans les deux, le grand déballage se poursuit. La leçon catalane et le danger d’un éclatement de l’Espagne n’a pas été perdue par tout le monde, et le gouvernement de Madrid propose à toutes les régions de les faire bénéficier du taux avantageux dont le pays bénéficie sur le marché obligataire, afin de les soulager du poids de leur endettement. Une démonstration pratique des intérêts de la mutualisation des dettes régionales est donnée, en vue de mieux faire réfléchir aux bienfaits de l’État espagnol, qui n’en a pas été exagérément prodigue ces dernières années.
Côté BCE, la même démonstration ne prend pas tournure, et la mutualisation de la dette à l’échelle européenne est toujours aussi mal partie. Saisissant au bond la balle lancée par Jens Weidmann et tentant de contourner les contraintes politiques, la banque centrale étudierait comme un pis-aller la possibilité de lancer une opération d’assouplissement monétaire qui serait garantie par les banques centrales nationales. Elles seraient chargées de provisionner d’une manière ou d’une autre – qui continue à faire débat – d’éventuelles pertes liées à l’achat massif d’obligations par la BCE.
Mais rien n’est décidé, et il faudra attendre le prochain rendez-vous de la réunion du Conseil des gouverneurs du 22 janvier prochain pour en savoir plus. Il coule de source que, une fois adopté, un tel dispositif ne ferait pas bon ménage avec l’union monétaire et représenterait un pas un avant vers sa dislocation potentielle. Afin de minimiser les risques, il n’inciterait pas à dimensionner fortement la création monétaire de la BCE et serait une nouvelle fois un coup d’épée dans l’eau.
L’Europe est dorénavant vécue comme étant un problème et non plus une solution, quel retournement ! Présentés en Grèce et en Espagne comme des démons, Syriza et Podemos représentent en réalité sa meilleure chance, tandis que Beppe Grillo réclame en Italie un referendum à propos de la sortie de l’euro, au nom du Mouvement des 5 étoiles. L’alternative à ceux qui préconisent une restructuration prioritaire de la dette est souverainiste, quand elle n’est pas xénophobe, et le camp des bien-pensants assimile avec dédain au « populisme » tout ce qui ne se range pas derrière des partis de gouvernement qualifiés – on se demande bien pourquoi – de responsables. Les enjeux sont devenus éminemment politiques et se situent à l’échelle européenne, où il n’y pas foule.