Billet invité.
Demain, sommet européen (on ne les compte plus) ! En ouverture, un petit coin de ciel bleu est toujours timidement recherché par Matteo Renzi, qui réaffirme « qu’il faut sortir les investissements d’un pays du Pacte de stabilité », tentant de donner un peu de marge de manœuvre dans l’application d’une politique européenne dont il est hors de question de demander frontalement le changement. Le président du conseil italien conjugue d’un certain point de vue ses efforts avec Frans Timmermans, qui joue le rôle inédit de président bis de la Commission. Le second de Jean-Claude Juncker, que ce dernier a ensuite relayé, a lancé un appel à des contributions supplémentaires des gouvernements au plan d’investissement de son patron, mais sans clarifier la question soulevée par Matteo Renzi, véritable nœud du problème : ces apports seront-ils ou non comptabilisés dans le déficit ?
Toujours sur ce même terrain, trois instituts économiques européens, l’OFCE française, l’IMK allemand et l’ECLM danois, ont proposé l’exclusion des dépenses d’investissement du calcul du déficit. Cette mesure s’inscrit dans le cadre d’une « stratégie macroéconomique alternative », qui préconise également l’achat par la BCE d’obligations émises par la Banque européenne d’investissement (BEI), afin de soutenir l’investissement public. En vue de favoriser la transition énergétique, il est aussi préconisé d’accroitre la fiscalité sur le carbone, tout en compensant l’augmentation du prix de l’énergie pour les ménages via un fonds européen, et par une taxe à l’importation pour les entreprises.
Hélas, le président de la Bundesbank ne l’entend pas de cette oreille. Jens Weidmann n’est toujours pas favorable au lancement d’un programme de création monétaire par la BCE, sauf à ses conditions. Au cas où, il a en effet décrit ce qui trouverait grâce à ses yeux. Pour avoir un effet, ce programme devrait être d’importance, remarque-t-il d’abord, pour préciser ensuite qu’il ne saurait être question d’autre chose que de l’achat de titres obligataires allemands sans risques. Sinon, les banques centrales nationales de l’Eurosystème devraient prendre ce risque, afin d’éviter sa redistribution parmi les États membres. On ne saurait être plus clair. La nouveauté est que selon lui la stratégie de réduction des déficits publics doit primer sur la mission de base de la BCE, qu’il réécrit en considérant qu’elle peut accepter une inflation inférieure à son objectif de 2 %, à la condition qu’une spirale descendante des prix et des salaires ne soit pas engagée.
Dans l’immédiat, les commentateurs spéculent sur l’effet favorable à la relance de la baisse du prix du pétrole, qui par ailleurs affecte fortement certains pays producteurs, dont la Russie. Celle-ci ne représente plus un débouché pour les produits européens et va devoir secourir ses banques dans l’urgence devant les défauts qui s’annoncent en cascade en raison de la hausse vertigineuses des taux. La main du Comité de politique monétaire de la Fed hésite à la veille de très prudemment confirmer la hausse progressive de son taux directeur, en raison des conséquences sur les marchés financiers et dans les pays émergents, qu’il cherche à atténuer. La Chine continue de lutter sans succès contre les effets de l’énorme bulle financière qu’elle a créée, sans pour autant parvenir à relancer l’économie sur la base du développement de son marché intérieur. Le premier ministre japonais cherche désormais à susciter une relance par la demande en préconisant avec peu de chances de succès la hausse des salaires par les entreprises privées, etc.
De quoi se plaignent donc les Européens ? L’inflation est encore à 0,3 % au sein de la zone euro d’après l’INSEE.