Billet invité.
Les trois coriums échappés de leur cuve d’acier de la centrale de Fukushima font enfin reparler d’eux. Non pas aux bons soins de Tepco, son opérateur, du gouvernement japonais ou des autorités de sûreté nucléaire, mais de ceux d’un laboratoire de l’Université de Tsukuba, plus particulièrement impliqué dans un domaine de recherche de pointe : le comportement des rayons cosmiques et plus spécialement des muons, ces particules de haute énergie et de charge négative. Celles-ci ont comme particularité de traverser à peu près tout ce qu’elles trouvent sur leur passage, à l’exception toutefois de substances à haute densité comme le combustible nucléaire. D’où l’idée de les utiliser afin de localiser les coriums dont la localisation reste inconnue. En traquant là où les muons sont bloqués grâce à la mesure de flux de muons entrants et sortants du réacteur de Tokaimura 2 qu’ils ont inspecté à titre de vérification expérimentale durant onze mois, les chercheurs ont fait apparaître en négatif une image du combustible.
Selon les chercheurs, une observation de plusieurs mois de cette nature devrait permettre de connaître le statut des coriums, ces amas fondus de combustible et de leurs gaines hautement radioactifs et portés à des températures extrêmes. Une des questions restée sans réponse est de savoir s’ils ont ou non traversé la semelle de béton qui se trouve sous les réacteurs, et suivant quelle géométrie ils se sont ensuite répondus dans le sous-sol.
Les prévisions à doigt mouillé sont que leur extraction ne pourra pas intervenir avant 2020 et durera de vingt à trente années. Par sa simple existence, un appel international à idées lancé en 2013 par l’organisme japonais Irid (International Research Institute for Nuclear Decommissioning) les relativise déjà. Il n’existe aucun précédent d’une telle opération et les équipements qui pourraient y procéder sont non seulement à inventer, mais à imaginer.