Billet invité.
Le traité de coalition allemand entre la CDU-CSU et le SPD comporte une phrase clé à propos de la politique européenne : « Nous plaidons pour que les États de la zone euro concluent avec le niveau européen des accords de réforme qui soient contraignants, opposables et légitimés démocratiquement ». Elle est à rapprocher d’un document issu des services du Conseil européen, en vue de sa prochaine réunion des 19 et 20 décembre, rendu public par Médiapart. Il y est proposé de conclure des « arrangements contractuels » ainsi que la description de « principes généraux des mécanismes de solidarité ».
Une formule de donnant-donnant fait débat et reste à trouver, associant des objectifs de réformes structurelles propres à chaque pays à des contreparties : « incitations financières » sous forme d’accès à des financements à un taux préférentiel pour des programmes d’investissement, ou bien allongement du calendrier de réduction du déficit public. Celle-ci passerait donc au second plan derrière les réformes structurelles, considérées comme la clé du retour de la croissance. Les modalités de cette inflexion à débattre, dans le cadre d’un rapport de force sous leadership allemand.
C’est un pas de plus vers une intégration économique européenne, dont l’orientation est tracée d’avance et dont il s’agirait de faire avaliser la mise en œuvre détaillée par les parlements nationaux ; des « partenaires sociaux » pourraient également signer les contrats prévus. Le tout afin de contourner l’écueil prévisible du rejet montant d’une Troïka symbolisant l’expression d’un pouvoir discrétionnaire – et non élu – composée des représentants de la Commission européenne, de la BCE et du FMI. Le projet parle élégamment « d’appropriation » par les États membres des réformes : en d’autres termes, la victime doit accepter le verdict, comme lors des grands procès staliniens des années 30, quel modèle, quel progrès démocratique !
Habillé du vocable solidaire, ce nouveau mécanisme systématiserait le dispositif mis progressivement en place avec les pays assujettis aux rigueurs des plans de sauvetage, dont les leçons sont tirées, son caractère plus ou moins contraignant restant à définir. Les services d’Herman van Rompuy, le président de l’Union européenne, sont à la tâche afin d’arrondir les angles et les hauts fonctionnaires s’affairent afin de trouver la mise en musique qui pourra faire consensus. La tournée de François Hollande en Italie et en Espagne n’avait pas d’autre objectif que de tenter de créer un groupe de pression permettant de contrebalancer le poids du gouvernement allemand dans les négociations à venir…