Billet invité
Désinflation ou déflation, en Europe, le choix se resserre en faveur de la seconde et conduit à privilégier cet indicateur au détriment de la croissance afin de caractériser au mieux la situation économique, en raison de son danger potentiel.
L’Espagne vient simultanément d’annoncer qu’elle sortait de la récession (+0,1 %) et qu’elle enregistrait une inflation négative de -0,1 %. L’Allemagne, pour parler des bien portants officiellement, connait une inflation de 1,2 %, en recul de 0,2 points d’un mois à l’autre. Les toutes dernières prévisions de la Commission pour la zone euro, comme toujours volontaristes, affichent à l’horizon 2015 un taux de 1,4 %, figé en dessous de l’objectif de la BCE de 2 % par valeur inférieure. Sa mission prioritaire de stabilisation des prix est donc compromise, quand bien même il serait recherché des raisons en réalité subsidiaires, comme les augmentations de la TVA ou bien l’incidence sur le prix de l’énergie importée de la valorisation de l’euro par rapport au dollar.
Les faits sont là : le glissement de la désinflation à la déflation se poursuit, avec comme conséquence le renchérissement du coût de la dette. Dans les pays les plus touchés, cela atteint leur solvabilité, avec comme effet une augmentation du taux de la dette que les achats par les banques nationales ne pourront pas toujours endiguer. Si l’on prend à nouveau le cas de l’Espagne, avec un taux d’intérêt réel pour le 10 ans à plus de 4 % et une croissance nulle, l’endettement public déjà attendu à plus de 100 % du PIB en 2015 est voué à faire boule de neige.
Dans ces conditions, que reste-t-il comme option à la BCE, si ce n’est s’engager résolument dans un programme d’achat de la dette, rejoignant ses consœurs américaine et britannique ? Car continuer à aider les banques à y procéder entre en contradiction avec l’objectif de leur renforcement, conduisant la BCE à gérer un conflit d’intérêt : poursuivre son soutien au marché en finançant les achats obligataires des banques et ignorer le danger potentiel que cela représente lors de son analyse de leurs bilans. Mais une telle mesure ne serait pas du goût de son premier actionnaire, la Bundesbank…
La logique destructive de la déflation est donc appelée à faire son œuvre, la BCE ne pouvant s’y opposer, le taux de croissance inférieur à celui de la dette et la valorisation de l’euro y contribuant. C’est l’héritage qui ne peut être refusé de la stratégie de désendettement poursuivie.