Billet invité.
Dans la longue série « on dit une chose, puis on en fait une autre », voici la Taxe sur les transactions financières (TTF) ! Car, disons-le tout de suite, elle était annoncée comme allant annuellement rapporter 35 milliards d’euros mais n’en prend pas du tout le chemin.
Que va-t-il en effet subsister du projet présenté par la Commission en février dernier, qui concerne 11 pays sur 27 de l’Union européenne, dont l’Allemagne, la France, la Belgique, l’Italie et l’Espagne, mais bien entendu pas le Royaume-Uni ? Afin de contrer toute tentative d’échapper à la taxe, il s’appuie sur le principe selon lequel toute transaction financière sera taxée si son donneur d’ordre est établi dans la zone des 11 pays de la zone de coopération renforcée, même si elle a lieu en dehors de celle-ci. Mais, dit-on, La City n’a pas attendu pour engager une réflexion en vue de créer des produits permettant de s’y soustraire.
Son rendement effectif dépendra également de l’assiette et des taux adoptés, sur lesquels la discussion s’est engagée et part dans tous les sens. La tendance est fortement à la baisse. Étant donné le caractère politiquement sensible du sujet, les discussions se poursuivent à huis-clos et les positions défendues par les uns et les autres ne sont pas clairement affichées.
Il semblerait, d’après une enquête du Financial Times, que les autorités françaises soient désormais favorables à la formule d’un droit de timbre (stamp duty), sur le modèle adopté par les Britanniques, rejoints par les Espagnols et les Italiens, ce qui remettrait en question la conception de la TTF.
Venant en défense des banques françaises et de leur important volume d’activité financière, le gouverneur de la Banque de France Christian Noyer vient d’ailleurs de descendre publiquement en flamme la TTF sur le thème qu’elle ne rapportera rien, que les transactions seront délocalisées, et qu’elle aura des répercussions négatives sur le financement de l’économie… Les autorités françaises voudraient en tout cas restreindre les catégories de produits dérivés qui seraient concernées, tandis que la Bundesbank demande que les opérations de refinancement des banques entre elles (le marché des repos) soient exclues de son champ d’application. La France et l’Italie voudraient en faire autant pour les obligations d’État, tandis que la première voudrait l’élargir aux transactions sur les monnaies, ce qui suscite un levé de bouclier sur le thème que cela serait contraire aux traités européens.
Les discussions ne portent actuellement que sur l’assiette de la taxe, car il a été décidé de repousser à un second temps la question des taux. Sans attendre, l’idée circule pourtant déjà que le taux de 0,1% sur les transactions des actions et obligations prévu par la Commission est prohibitif et devra être revu. Viendront ensuite la question de l’affectation des fonds et, au final, du calendrier d’implémentation de la TTF…
Cela n’est pas une découverte, dès lors qu’il s’agit du système financier, les ministres sont prêts à tous les accommodements, convaincus que c’est de lui que viendra le salut. Pas question de tirer la leçon, visible comme le nez au milieu de la figure, que le noyer sous des flots de liquidité, desserrer les contraintes réglementaires destinées à le consolider et diminuer la taxe à laquelle il pourra être assujetti concourent non pas à relancer l’économie mais à alimenter la spéculation. Serait-ce donc le but recherché ?