Il va falloir « vivre avec le virus sur le temps long » reconnait enfin le Premier ministre français Jean Castex devant l’évidence. Il s’abrite désormais derrière la perspective d’une vaccination sans succomber à ses sirènes, les effets d’annonce relativisant les succès obtenus, une fois expliquées leurs limites pratiques (la conservation à -70 degrés) et les inconnues qui subsistent à leur égard.
Il est trop dérangeant d’admettre que la crise en cours n’est pas passagère car cela mènerait trop loin. Comment expliquer qu’en dépit de l’argent quasi gratuit l’économie soit en déflation (à l’exception de son prospère secteur financier) ? Que des secteurs entiers des services sont gravement sinistrés et qu’une propagation à d’autres est à craindre, à commencer par l’augmentation des défauts des entreprises, la dette privée devenant la principale menace ? Que les gouvernements interviennent à grand frais, devenus les derniers recours, et qu’ils ne savent pas comment s’arrêter ?
Quitter la sphère économique est essentiel si l’on veut comprendre les enjeux devant lesquels les gouvernements sont placés. La vie « normale » n’est plus possible et cela pour une durée inconnue, ce qui suscite déjà des réactions et va laisser de profondes traces. Des drames sont en cours tandis que la cohésion sociale maintenue bon gré mal gré est menacée par le cancer rongeur des inégalités sous toutes ses formes, quand les manifestations exemplaires de solidarité restent marginales, bridées de surcroit par le confinement. Le déni et le complotisme progressent dans la confusion ambiante, en vertu de la préférence accordée aux idées simples et de la montée de la défiance. Où cela mène-t-il ? Comment la démocratie représentative, déjà bien malmenée, s’en sortira et qu’elle réponse saura-t-elle apportée à sa crise ?
La hardiesse qui s’imposerait dans ces conditions n’est pas au rendez-vous faute de l’envergure requise. Le pragmatisme n’est pas plus convaincant devant l’escamotage des exigences d’une situation inédite.
« Le fascisme n’est pas le contraire de la démocratie mais son évolution en cas de crise. »
Bertolt Brecht
Les lois d’exceptions intégrées à la loi commune, le scénario d’un fascisme souriant et propre sur lui qui supprimera les libertés au nom de leur défense devient un scénario chaque jour plus probable.
Sécurité globale : la loi qui va détruire nos libertés