Il n’est question sous un angle restrictif que de l’arbitrage entre les mesures adoptées pour protéger de la pandémie et celles destinées à préserver l’activité économique. Mais l’économie est prise dans le sens restreint qui prévaut de nos jours alors qu’à son origine elle signifiait l’administration de la maison au sens large.
Les économistes d’aujourd’hui ne s’aventurent que rarement sur les rives de la sociologie et se cramponnent à leur discipline. La pluridisciplinarité qui serait de rigueur est contradictoire avec leur étroite spécialisation et ne favorise pas le travail en équipe permettant des approches complémentaires. Tandis que le PIB, comme on sait, reste un instrument très imparfait qui continue cependant de faire loi. N’envisager que le coût économique des contraintes est réducteur, car cela écarte le coût social.
Vivre avec le virus est une vue inadéquate, il faudrait dire vivre avec l’incertitude régnante et installée, qui ne provient pas uniquement de la pandémie. Désormais l’incertitude s’impose, la société de consommation magnifiée à fait oublier ce qu’a connu la génération de la guerre et cela revient.
Le capitalisme est mal parti, mais il serait erroné de sous-estimer sa résilience et de surestimer l’avènement proche d’une société nouvelle. D’évidence les contours et la stratégie qui en seraient porteurs restent flous. Bien que des pratiques alternatives apparaissent, la vie sociale s’adaptant aux circonstances, et il n’est pas interdit d’y prendre goût. La notion de biens communs n’est plus réservée aux chercheurs, le bénévolat et l’action locale collective ainsi que de nouvelles formes de démocratie participative se développent.
L’arbitrage entre santé et économie et le choix du moindre mal ne doit plus être laissé à la discrétion du sommet de l’État. La résilience a vocation à être collective et pas seulement sous la forme d’appels à la responsabilité venus d’en-haut. Mais la Convention citoyenne pour le climat a donné en France le mauvais exemple en ne retenant pas certaines de ses préconisations et en édulcorant d’autres tout en prétendant les adopter.
Une autre approche consiste à étudier la prévention des prochaines pandémies, qui sont prévisibles. La lutte contre les maladies infectieuses est à un tournant qu’il faut prendre. On sait qu’elles ont en commun d’être d’origine animale, plus précisément de mammifères, ce qui leur vaut d’être qualifiées de « zoonoses », et que nos activités humaines comme la perte de biodiversité en sont responsables. Les agents pathogènes trouvent ainsi leur voie. Combattre les prochaines pandémies, c’est se préparer à les étouffer dans l’œuf sans attendre, dès qu’elles sont détectées. Et, d’après les spécialistes, de revoir notre modèle agricole et de préserver les habitats naturels des animaux sauvages afin d’éviter leur contact et pire, leur consommation.Le préventif est moins coûteux que l’action curative qui prévaut.
Un tournant radical est à prendre avec l’avènement d’une médecine dite « 4.0 » et ses moyens de détection et de diagnostic personnalisés grâce au déploiement des technologies numériques et de l’intelligence artificielle. Le parcours médical de chacun serait individualisé, ce qui repose naturellement sur l’Internet des objets et renvoie au contrôle et à la protection des données.