Faible consolation dans les milieux gouvernementaux et d’affaires, la récession serait un peu moins marquée que prévu en Europe, relançant chez certains des espoirs de relance déjà déçus. C’est sans compter avec le rebond de la pandémie en phase ascendante, qui affecte tous les pays, et avec les effets des mesures destinées à en freiner la propagation, même prises à reculons. Le gouvernement français apparaît une nouvelle fois dépassé par les évènements, sa stratégie de mesures prises localement pas longtemps tenable. Quelles mesures « difficiles », annoncées mais non décidées, va-t-il devoir se résoudre à prendre ?
À tous égards, l’avenir n’est pas tracé. Pourtant dans son rôle, le Parlement européen se fait fortement prier pour valider le plan de relance communautaire, accusé de le mettre en péril avec ses désaccords malgré son adoption par les chefs d’État et de gouvernement. Il y a malaise, car il a le dernier mot, en attendant la validation des parlements nationaux. De ce seul point de vue, le « grand tournant » annoncé connait un début difficile.
La BCE aurait-elle le pressentiment que de nouvelles secousses attendent les banques et qu’il faut les aider à s’y préparer ? Elle étudie la mise sur pied d’une plate-forme de vente sur Internet des 500 milliards d’euros d’actifs bancaires dépréciés – les « prêts non performants » – afin d’éviter que les investisseurs spécialisés, Cerberus, Blackstone, Lone Star et Goldman Sachs, les achètent avec une très forte décote. Car les banques vendent leurs portefeuilles de ces actifs dévalorisés pour des montants de plusieurs milliards d’euros, ce qui nécessite de disposer d’une grosse surface financière pour les acheter. Il est donc question de susciter leur achat par de nombreux investisseurs grâce à ce nouveau moyen, afin de diminuer leur décote en équilibrant ainsi le rapport de force, procurant une aide indirecte notable aux banques.
Autre indice allant dans le même sens, les prêts à long terme du programme TLTRO de la BCE rencontrent un succès dépassant toutes les prévisions. Proposés à un taux négatif, ils reviennent à rémunérer les emprunts des banques au taux de 1%, une véritable aubaine ! 147,5 milliards d’euros ont ainsi été empruntés au guichet de la BCE. Même en achetant des obligations françaises à dix ans actuellement au taux de -0,26%, les banques s’y retrouvent, c’est bien cela l’objectif poursuivi quand leur rendement est atteint.
Le rapprochement s’impose-t-il ? Éviter la saturation des services de réanimations hospitaliers aurait-il comme pendant la bonne santé du système bancaire ? Dans les deux cas, ce n’est pas joué si la reprise est encore repoussée sans savoir jusqu’à quand. En attendant, autre signe encore, les dogmes budgétaires allemands sont une nouvelle fois piétinés. Le gouvernement prévoit d’emprunter plus de 90 milliards d’euros pour boucler son budget 2021, la règle du « zéro déficit » inscrite dans la Loi fondamentale – la Constitution allemande – n’étant plus de circonstance.