Le Premier ministre français Jean Castex s’est aventuré sur un terrain peu familier en qualifiant le plan de relance dont il assume la paternité de « keynésianisme de l’offre », un concept qui lui appartient et qu’on lui laissera. Tout est bon pour brouiller les pistes ! Plus prudent, Emmanuel Macron a préféré présenter sa vision de la République en retournant au Panthéon pour s’en tenir au maniement des idées, un terrain où il prétend briller à son avantage.
Comment reprocher au gouvernement de privilégier le soutien aux entreprises, car favoriser la demande n’aboutirait qu’à gonfler encore l’épargne de précaution sans autre résultat ? Telle est la piètre justification d’une politique qui n’ose se revendiquer et qui élude la cause de ce gonflement. En fait de relance, le plan cousu de fil à bâtir vise en priorité à boucher les trous afin d’éviter l’effondrement de secteurs productifs entiers, au mépris de la transition écologique dont il se réclame. C’est le cas flagrant de l’industrie aéronautique et automobile. Puis il répartit en 70 mesures son montant, illustrant à merveille le proverbe « qui trop embrasse mal étreint ».
Les autorités allemandes ont choisi de baisser la TVA afin de favoriser la consommation, tout en débattant à propos de la recapitalisation des entreprises, que certains estiment indispensable et d’autres refusent au prétexte de ne pas créer des « entreprises zombies ». On n’en a d’ailleurs pas fini avec ce sujet qui rejaillira à propos de la poursuite de la politique de la BCE, les doctrinaires de l’ancien monde n’entendent pas capituler. Les dirigeants français prétendent sauver l’emploi en soutenant les entreprises par tous les moyens, sans effleurer ce débat. Et les mesures fiscales les concernant ne produiront pas leurs effets avant la moitié de l’année prochaine. La seconde vague sera celle des licenciements en attendant.
Présenté sous son meilleur jour, le plan vise à changer les anticipations des particuliers et des entreprises, sans imposer de contreparties aux aides à ces dernières qui bénéficient d’un chèque en blanc. Les premiers afin qu’ils consomment, les secondes pour qu’elles investissent dans l’avenir en embauchant. Le maître-mot est de renouer avec « la confiance », mais ceux qui s’y abandonnent y croient-ils réellement ?
Emmanuel Macron, occupé à flatter son électorat de droite, change de sujet en dénonçant le séparatisme islamiste. Pour que le geste accompagne la parole, il annonce une inévitable nouvelle loi à ce sujet, renouant avec le thème de la sécurité qui lui est plus favorable. Pour ne pas oublier son flanc gauche, il développe également sa conception de classe de l’égalité. Sans surprise, il associe « l’égalité des chances » à l’exercice du « mérite », comme si tout le monde naissait avec une cuillère en argent dans la bouche. L’égalité, il faut la mériter !
Élargissant le débat, tout à son rôle de vigie, Patrick Artus est convaincu que « le capitalisme néolibéral que l’on critique tant va se durcir encore davantage dans les années qui viennent sous l’empire de la nécessité. » Réagissant à l’idée qui s’est répandue qu’un endettement massif à vocation perpétuelle est inévitable – sans présenter d’alternative – il pense que cela « prépare le terrain à une injustice sociale considérable et intenable à terme. » Constatant que « la base monétaire des pays de l’OCDE est passée de 3.000 milliards en 2007 à 24.000 milliards de dollars en 2020, il en déduit que « le risque de cette explosion monétaire, c’est de renchérir le prix de certains actifs et de maintenir de façon permanente des taux d’intérêt bas. L’immobilier, par exemple, devient de plus en plus cher, et le rendement de l’épargne des citoyens, lui, devient inexistant. Et il conclut « Je ne vois pas comment l’on peut maintenir la cohésion d’une société sur de tels principes. »
À moins qu’un durcissement du capitalisme ne soit la réponse.
Bof, Patrick Artus veut simplement sauver le système duquel il participe. Et accessoirement, sans doute dégager sa responsabilité de la catastrophe qui vient.
« Le fascisme n’est pas le contraire de la démocratie mais son évolution en cas de crise. »
Bertolt Brecht
Which Past Is Prologue?
« Constatant que « la base monétaire des pays de l’OCDE est passée de 3.000 milliards en 2007 à 24.000 milliards de dollars en 2020, il en déduit que « le risque de cette explosion monétaire, c’est de renchérir le prix de certains actifs et de maintenir de façon permanente des taux d’intérêt bas. »
8 fois plus de base monétaire pour les pays de l’OCDE alors que dans le même temps le PIB mondial a fait une progression de seulement 57% (en gros 54 à 85 000 milliards $ US). La planche à billets tourne donc bien à plein régime, mais au lieu d’une inflation ,en tout cas dans les pays développés et stables, sur ce que je nommerai les biens et produits matériels usuels généralement représenté inégalement dans l’indice INSEE (le taux d’inflation), ces courants de liquidités alimentent les Bourses, le marché de l’Immobilier, l’Art, le vin, et autres voitures de collection, mais pour combien de temps encore ?
D’ailleurs, par le bon bout de la lorgnette on peut constater avec évidence que lorsque les banques commerciales ont engagé de telles sommes au delà des avoirs des déposants, que in fini les banques centrales créés l’argent nécessaires pour éviter le manque de liquidité. Donc dans la réalité, elles créés bien de l’argent ex-nihilo de fait, pas par leurs propres jeux d’écritures à elles, mais en tenant la main des BC (dont elles sont actionnaires comme aux USA…)