Le trou d’air est conséquent, la chute de la croissance se confirme, pas seulement en Europe. Les prévisions sont aléatoires faute de pouvoir estimer l’étendue des dégâts, car l’impact économique et financier de la pandémie, doublé de ses incertitudes, reste une inconnue.
Les effets de la simultanéité de la crise dans tous les pays est sous-estimé alors que la contagion est manifeste. Dans un monde globalisé et interconnecté, la dynamique est désormais inversée. Les chaînes de production ne se reconstituent pas d’un claquement de doigts et leur aménagement prend du temps. Le chiffre d’affaires perdu ne sera pas récupéré, certains secteurs comme le tourisme et le transport sont profondément atteints. D’autres, comme l’industrie automobile, rencontrait déjà des difficultés en raison de sa reconversion. Facteur supplémentaire et non des moindres pesant sur la reprise, la consommation des ménages ne retrouve pas ses couleurs.
Les États-Unis sont entrés en récession et l’Allemagne a connu une chute de 10% de son PIB au deuxième trimestre, ne se relevant que partiellement de son plongeon. On en vient à penser que les pays les plus affectés par la chute du tourisme pourraient s’en remettre plus vite pour peu que la pandémie ne reparte pas ! Le modèle économique allemand risque au contraire d’être plus durablement touché en raison des restrictions commerciales qui sont dans l’air du temps.
Comme toujours, l’état du système financier est plus délicat à apprécier. On sait cependant que le risque a partiellement émigré des banques vers le secteur non régulé, tout en oubliant souvent de préciser que les deux secteurs sont étroitement connectés. Quoi qu’il en soit, l’Autorité bancaire européenne (EBA) a publié une étude qui montre que l’exposition au crédit à effet de levier est concentrée dans les plus grandes banques, tandis que les assureurs et les fonds d’investissement sont davantage exposés aux obligations et aux Collateralized loans obligations (CLO). Selon l’EBA le gel du marché des CLO empêche les banques de s’en délester.
Elles ont encore un peu de temps devant elles, car seuls 10% de ces actifs viennent à échéance cette année, et la moitié après 2023, ce n’est donc que partie remise si la reprise ne vient pas redresser le tir. Les banques peuvent aussi pousser les miettes sous le tapis en omettant de reconnaître certains actifs comme étant en difficulté, sachant pouvoir compter sur la mansuétude des régulateurs.
Une précision s’impose, le marché des prêts à effet de levier pèse 1.000 milliards d’euros en Europe selon le FMI… Il n’est donc pas nécessaire que le taux de défaut soit très élevé pour créer de sérieux problèmes. Or la crise en cours a un impact important sur les revenus, la liquidité et finalement la solvabilité de nombreuses entreprises.