C’est certes mieux que rien, mais le compromis laborieusement trouvé entre les chefs d’État et de gouvernement européens, qualifié rien de moins que de « copernicien » par Charles Michel, n’a pas recueilli un franc succès au Parlement européen. Les 27 parlements nationaux allant être appelés à l’entériner, la route s’annonce sinueuse.
Une motion adoptée par le Parlement européen déplore les coupes effectuées au nom du compromis dans la proposition de budget de la Commission et demande une renégociation. La réduction du montant des subventions de 500 milliards d’euros à 390 milliards s’est faite au détriment du budget pluri-annuel de la Commission avec lequel un package avait été décidé. Peu probable toutefois que la fronde aille jusqu’à un vote négatif, du jamais vu, mais il va falloir trouver quelque chose pour calmer le jeu.
À propos du plan de relance et de résilience, le parlement hollandais va renâcler et l’a déjà fait savoir. Mais cet obstacle franchi la suite risque de se compliquer. Certes, Mark Rutte n’a pas obtenu le droit de veto qu’il exigeait, mais la procédure retenue en cas de désaccord quant à l’utilisation des fonds ralentira leur transmission si elle est actionnée, ce qui ne va rien arranger. Jens Weidmann, le président de la Bundesbank, n’a d’ailleurs pas tardé à s’exprimer dans Handelsblatt au sujet de ce mécanisme de contrôle en abondant dans le sens du Premier ministre hollandais, les conditionnalités rôdent, comme le virus. Les effets du compromis sont imprévisibles, le pouvoir dont disposait hier la Troïka -composée de la Commission, la BCE et le FMI- est désormais entre les mains des 27 parlements nationaux, on a fait mieux en termes de renforcement de l’Europe…
La manière dont l’espace Schengen est maltraité, au départ afin de stopper l’afflux des réfugiés, puis désormais en vue de se protéger contre la contagion du voisin, est hautement symptomatique de l’état de l’Union. Une grande cacophonie s’est installée au détriment de toute coordination et de politique commune et le statut des frontières fait l’objet de décisions nationales.
Pis, il y a deux urgences simultanées et contradictoires, économique et sanitaire – ce qui n’est d’ailleurs pas propre à l’Europe – et l’arbitrage qui a été rendu en faveur de la relance économique est de fait suspendu aux aléas de la pandémie. Les autorités croisent les doigts.
Sonnant comme un réconfort, la lutte contre le réchauffement climatique bat son plein, tout du moins en paroles. Pour mémoire, l’Union européenne doit réduire ses émissions de CO2 de 40% d’ici 2030, et atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 (l’équilibre entre ses émission et son absorption par des « puits de carbone », les forêts pour l’essentiel). Mais l’investissement vert qui est revendiqué est une notion fourre-tout, faute de critère européens stricts le définissant. On pense à la défense de l’électronucléaire par ses partisans. La transition écologique n’épargne pas des simulacres et des annonces spectaculaires en trompe-l’œil.
On recherche des bonnes nouvelles qui tiennent la route.