Quel que soit le bout par lequel on saisit l’affaire Wirecard, on n’est pas déçu ! Tous responsables et tous coupables ! 1,9 milliard d’euros figurant dans ses comptes n’ont « probablement jamais existé », les fins limiers sont sur la piste afin d’expliquer le pourquoi du comment.
Le régulateur allemand, la BaFin, a été le premier sur la sellette, mais cela ne s’est pas arrêté là. Le gouvernement ne pouvait pas ignorer, puisqu’il l’avait décidé, que sa surveillance était sous-traitée à un organisme privé, faute de moyens semble-t-il. Avec comme conséquence que l’agence de notation qui suivait Wirecard, Ernst & Young, trempait dans un magnifique conflit d’intérêt.
L’Esma, le régulateur européen des marchés, a depuis entamé une enquête sur les manquements de la BaFin. Elle a déjà produit un rapport préliminaire, transmis à la Commission, mais que peut-on en attendre connaissant sa pudique discrétion ? En attendant, le ministre des Finances allemand, le social-démocrate Olaf Scholz, se retrouve au cœur d’un scandale politique, car il apparait qu’il avait été dès février dernier averti par la BaFin qui tient à ne pas jouer le rôle du lampiste, des doutes qui planaient sur Wirecard, sans cependant bouger le petit doigt. Le secrétaire d’État aux Finances, Jörg Kukies, un ancien de Goldman Sachs, apparait tout désigné pour jouer le fusible, ayant par deux fois rencontré l’ex-Pdg de Wirecard Markus Braun et se refusant à dévoiler le contenu de leurs conversations. Le ministre avait déjà réussi à se défausser lors d’un scandale de fraude fiscale qu’il aurait couvert du temps où il était maire de Hambourg, mais une commission d’enquête parlementaire lui pend au bout du nez.
L’affaire a déjà ses prolongements en Autriche, l’un des dirigeants sulfureux de Wirecard, l’Autrichien Jan Marsalek, étant fortement soupçonné de liens avec les services de renseignement. Avec son compatriote Markus Braun, il fréquentait assidument les milieux politiques autrichiens, en particulier le FPÖ d’extrême-droite – qui a gouverné en coalition avec l’ÖVP – et que l’on devine n’être pas éloigné du service de renseignement de l’armée russe, le GRU.
Quelle salade russe ! On y trouve aussi de probables opérations de blanchiment d’argent de Wirecard, camouflées aux Philippines. La libre circulation mondiale des capitaux laisse on le sait les régulateurs nationaux impuissants, même lorsqu’ils sont désireux de bien faire. Le recyclage des profits massifs des activités criminelles, la drogue au premier rang, rend à l’arrivée illusoire la distinction entre argent « sale » et « propre ». Pour un Wirecard qui est épinglé, combien de scandales impliquant des établissements honorables sont-ils ignorés ? Pas étonnant de trouver des pêcheurs dans ses eaux troubles. Cela va de pair avec l’activisme d’officines occultes de hackers chargés de basses besognes, ainsi qu’avec l’engagement de « milices privées » commanditées. L’espionnage de papa est à reléguer au Musée Grévin ou chez Madame Tussauds…
À suivre.