À quoi servent vraiment les régulateurs financiers ? Dans un premier temps, ils ont réglementé la finance bancaire et négligé la finance de l’ombre. On en comprend pourtant l’importance quand Bruxelles accorde sans tarder, en cas d’absence d’accord global, un régime d’équivalence aux chambres de compensation britanniques des produits dérivés. Puis les mêmes ont commencé à défaire par touches successives ce qu’ils avaient construit.
La SEC, l’agence américaine de la réglementation et du contrôle des marchés financiers, vient à cet égard de s’illustrer. Elle a décidé la suppression de la déclaration trimestrielle auxquels les hedge funds étaient soumis depuis des décennies, qui les astreignait à fournir la liste des actions qu’ils détiennent. Seuls les 10% plus importants, dont le montant des actifs est supérieur à 3,5 milliards de dollars, resteront assujettis à cette obligation.
La transparence prend un nouveau coup, l’opacité du marché des actions s’accroît. Car ces relevés permettaient, même imparfaitement en raison de leur retard, de comprendre qui détenait quoi, fournissant des données utiles aussi bien aux régulateurs qu’aux investisseurs. Leur consultation permettait également aux entreprises d’identifier leurs actionnaires ! Plus que jamais la finance est un royaume réservé aux initiés.
Pour mémoire, le marché américain des actions est de 35.600 milliards de dollars, en croissance fulgurante depuis 1975 où il était de 1.100 milliards. Une grande partie de cette masse financière se déplace donc désormais sans pouvoir être localisée, l’ombre s’étend le cadastre disparaissant.
La SEC ne s’est pas embarrassée de prétextes. Jay Clayton, son président a simplement argué que cette suppression, assimilée à une simple formalité, allait soulager les hedge funds d’une tâche qualifiée de « non nécessaire » ! Un régulateur revendiquant sa propre cécité, il n’y a pas de quoi rêver !