Le temps est venu d’une « grande réinitialisation du capitalisme » proclame Klaus Schwab qui se défend de tout « rêve impossible » tout en énonçant un programme chimérique. On aurait envie de lui dire chiche, comme s’il suffisait de pousser un bouton ! D’année en année, le fondateur du Forum de Davos nous a habitués aux envolées sans lendemain, son fonds de commerce. Dans la foulée, de grandes entreprises américaines soucieuses de leur image de marque affichent des convictions anti-racistes, mais l’on est accoutumé à s’interroger sur leurs concrétisations.
Certes, tout ne va pas redevenir comme avant, la récession s’annonce trop profonde et prolongée, mais ce n’est pas une question qui va vite se régler. Des inflexions dosées vont être ici ou là nécessaires en raison de l’ampleur des dégâts à venir d’une récession, dont il est craint qu’elle tourne à une grande dépression. « Un coup dévastateur a été porté à l’économie mondiale », affirme David Malpass qui préside la Banque mondiale et cela ne peut être ignoré. Et, devant la nature incontrôlable de la crise, des analystes admettent ne plus être en mesure d’établir leurs prévisions. Les embellies boursières auxquelles d’autres se raccrochent n’annoncent pas un mieux ni ne reflètent la clairvoyance des investisseurs et caricaturent leur aveuglement. Ce qui est pris n’est plus à prendre !
Parlons-en plus clairement, de ceux-là ! On sait l’émergence des fonds d’investissement géants et leur influence sur les marchés, mais la concentration financière ne se limite pas à ce seul secteur. Côté hedge funds, le même phénomène est observable. Ils ne sont pas moins de 16.000 à intervenir, mais seulement 5% d’entre eux concentrent 63% des capitaux qu’ils ont au total en gestion. Clairement identifiés, ils se dénomment Citadel Investments, Renaissance, Bridgewater… L’extrême concentration n’est décidément pas réservée au cercle restreint des mégabanques que les régulateurs qualifient de systémiques en leur accordant un traitement particulier.
Quand cela va mal, l’État répond toujours présent en employant les grands moyens quitte à braver les interdits. Les programmes de soutien se succèdent, mais il n’y en a jamais assez quand tous les secteurs d’activité frappent à la porte. Cela augure non seulement d’arbitrages dont pâtiront les laissés-pour-compte mais, s’agissant de la construction européenne, de l’apparition d’une nouvelle contradiction. L’Union a été bâtie selon un modèle qui n’est plus d’actualité, car il est attendu qu’elle soit plus axée sur le bien-être, la solidarité et la réduction des inégalités, alors que sa mission principale est de limiter le rôle des États sur les marchés. Comment négocier un tel tournant ? Faute d’y parvenir, ces aspirations sont porteuses de déceptions et de désamours grandissants avec l’Europe. Les États membres de l’Union rencontrant de sérieuses difficultés à s’entendre sur une réponse à la crise, comment trouveraient-ils un consensus pour engager des réformes structurelles profondes, alors qu’ils sont rivés à des traités dépassés qui ne sont plus appliqués mais continuent de faire autorité ?
Dans l’immédiat les États bricolent et en sont réduits, pays par pays, à prendre en charge via des programmes à rallonge une partie importante des salaires du secteur privé en lieu et place d’actionnaires qui n’assument pas leur responsabilité. Il est calculé, pour le justifier, qu’il faudrait sinon payer les indemnités chômage et que cela permet de percevoir d’avantage de cotisations sociales. Devant la multiplicité des faillites annoncées, il est également proposé que l’État procède à des abandons de créances auprès des entreprises, puisqu’elles ne pourront pas être recouvertes de toute façon. Toutes n’en bénéficieraient pas, et il est proposé de refiler la patate chaude du choix aux banques afin de protéger les gouvernants… Trois économistes français, Olivier Blanchard, Jean Pisani-Ferry et Thomas Philippon, membres du comité de réflexion mis en place par Emmanuel Macron, sont à l’origine de ces innovations passablement iconoclastes quoique dans l’air du temps.
Je relaie le commentaire d’un lecteur reçu par ailleurs.
FdL
Quelques idées perso qui valent ce qu’elles valent…
– Durant cette pandémie, les humains ont été confinés, mais pas les processus économiques, juridiques, réglementaires et conventionnels. Tout a continué à rouler.
J’ai cette image: le chauffeur routier a été contraint à rejoindre sa couchette mais le camion a continué de rouler.
La « crise » économique qui s’en suit n’est donc pas une crise, mais une conséquence de la non-mise en pause de l’économie, etc. (sauf domaines indispensables: nourriture, santé, énergie, poubelles…)
Nous devrions avoir une réunion de l’AG de l’ONU 24h/24 pour mettre en oeuvre un plan global de sortie de confinement. Tous les pays ont les mêmes problèmes. Divisés, ils font le jeu des banksters.
Il est temps (!?) de rappeler que l’économie est un outil permettant la répartition optimale des biens et services au service de l’Humanité.
Lorsque l’outil prend le contrôle de celui qui s’en sert, ce n’est plus un outil.
Si au lieu de servir à cette répartition il est utilisé pour accumuler toujours plus d’argent (qui doit être le fluidifiant du système, et pas le bloquer avec des poches d’accumulation déraisonnables) alors le système tourne mal.
Une idée est de mettre une Date Limite d’Utilisation à l’argent.
Chaque somme qui circule est affectée d’une date limite lorsqu’elle arrive sur un compte. C’est très simple avec les ordinateurs, nul besoin d’IA.
Tous les ans, hop, la somme prend -10% (par exemple).
Je dis tout ça…
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Bôf et bôf…
Mon avis sur la seconde partie:
L’idée de monnaie fondante ( volontairement ou par construction) a un siècle.
La chose avait été débattue sur le blog de Paul Jorion, avec un accueil négatif.
Paul était contre. Je ne me souviens plus de ses arguments. Sans doute que les inconvénients l’emportaient largement sur les avantages.
De toute façon, ce n’est qu’une solution genre emplâtre sur une jambe de bois. Il faut remonter plus en amont. La raison, peut-être pas principale mais néanmoins dirimante, est que la finance ( phynance) trouvera un moyen pour contourner cette disposition, et même en faire son beurre.
Et aucun barrage de papiers n’y fera quelque chose.
Aller plus en amont: c’est la phynance qu’il s’agit de faire rentrer dans le droit commun.
C’est une action entièrement politique, c’est à dire gouvernée par le rapport de force.
Vous parlez de rapport de force.
J’ai évoqué l’ONU, seule organisation internationale POLITIQUE susceptible de contrôler le système financier transnational.
J’ai évoqué l’argent, source de ce pouvoir, justement pour le limiter.
Mes deux suggestions, certes imparfaites et simplistes, vont précisément dans le sens de la mise en place de rapports de forces plus favorables au Politique qu’ils ne le sont aujourd’hui.
Si je bossais dans la finance, aucun doute que je dirais « bof bof » à ces deux idées.
Mais je ne me fais pas d’illusions. Les politiques nationaux, en plus d’être sous la coupe de la finance, ont en plus la prétention (bien naturelle) de ne pas perdre de pouvoir. L’ONU leur en retirerait – comme le fait l’Europe d’ailleurs, tiens.
Les conseillers économiques et économistes de révérence sont là pour expliquer que, quoi l’ONU, ce machin ?
Et oui. Un machin capable de produire un pouvoir Politique énorme.
Les problèmes sont planétaires.
Pollutions, réchauffement, déplacement des populations, économie, droits de l’homme et de la femme (ils sont partout les mêmes)