Les ministres des Finances de la zone euro vont-ils demain progresser et créer les conditions d’un prochain sommet permettant de sauver la face ? Les paris sont ouverts mais l’optimisme est mesuré.
La chancelière allemande Angela Merkel a suscité quelques espoirs en jugeant que l’Union européenne faisait face « à sa plus grande mise à l’épreuve depuis sa fondation », en tirant comme conclusion que « c’est dans l’intérêt de tous, et c’est aussi l’intérêt de l’Allemagne, que l’Europe sorte forte de cette mise à l’épreuve ». Mais quelles décisions peut-il en être véritablement attendu ?
Cherchant un biais, les commissaires européens Thierry Breton et Paolo Gentiloni ont demandé dans une tribune publiée en Allemagne par le Frankfurter Allgemeine Zeitung de faire preuve de « solidarité » en créant un fonds européen capable d’émettre des obligations à long terme, qu’ils se gardent de nommer euro-obligations. Cela serait selon eux un « quatrième pilier » indispensable qui s’ajouterait au Mécanisme européen de stabilité (MES), à la Banque publique d’investissement (BEI) et au programme « Sure » de la Commission destiné à financer le chômage partiel.
Mais Mario Centeno, qui préside l’Eurogroupe, exprime de son côté la crainte qu’une surenchère nuise à l’adoption de ces trois premiers piliers qui sont toujours cela de pris. Il est aussi tentant de renvoyer à plus tard l’examen d’autres dispositions, au prétexte qu’elles pourraient trouver leur financement dans le cadre du budget pluri-annuel de la Commission pourtant déjà très discuté.
Après avoir fait litière de la règle budgétaire dite « déficit zéro », les autorités allemandes se décideront-elles à sauter un autre pas ? Certes, certains opposants à toute mutualisation ont tourné casaque et reconnaissent désormais que des euro-obligations enverraient « un signal fort ». C’est le cas de Michael Hüther, l’un des sept éminents économistes allemands qui plaident en ce sens. Et le Conseil des experts économiques auprès de la chancelière est divisé.
Mais le camp du refus fait valoir qu’une telle décision devrait être approuvée par le Bundestag à la majorité des deux-tiers, se réfugiant derrière un avis de la Cour constitutionnelle allemande. Sur les brisées du directeur du MES, Klaus Regling, les dirigeants de la CDU s’en tiennent à l’activation de celui-ci, quitte à oublier les conditionnalités contraignantes prévues. Inventer un nouvel instrument serait selon eux très long et compliqué. Que pèsent alors les Verts dont l’une de leurs porte-paroles, Franziska Brantner, fait des euro-obligations « un problème existentiel » ?
Combien de temps va-t-il falloir pour que cette digue cède ?