Que se passera-t-il quand nous sortirons, un jour, de cette crise qui paralyse le fonctionnement « normal » du monde, dépassant tout ce que l’on pouvait imaginer ? Il y a ceux, invétérés, qui au plus profond d’eux-mêmes restent persuadés que tout reviendra comme avant, et il y a les autres qui se prennent à espérer qu’il n’en sera rien, que le choc est trop puissant, et que les mises en cause de facto qui interviennent aujourd’hui ne passeront pas à la trappe. L’histoire n’est jamais écrite à l’avance, ce truisme est de faible consolation, mais sait-on jamais ? « L’An 01 » n’est il qu’une rêverie ?
La situation de pandémie et le sentiment d’impuissance qu’elle génère portent en elles une prise de conscience nouvelle. Notre système n’est pas intangible, ressenties ses faiblesses sont mises à nu, et la contestation des politiques déjà bien avancée est dépassée. Pour certains, il y a certes toujours l’espoir que ce n’est qu’un mauvais moment à passer, mais entretemps il aura été fait appel à de nouveaux ressorts. Auront-ils été sollicités en vain ? quelle trace laisseront-ils ? En attendant de le savoir, « le salut ne vient pas d’en haut » rejoint le vieux mot d’ordre des écologistes « penser global et agir local ! ».
Les vieilles recettes sont réutilisées, la nationalisation des pertes redevient dans l’actualité. À l’opposé, le concept des biens publics n’est plus l’apanage de quelques éclaireurs. L’apprentissage du partage et de la collaboration s’instaure en pratique courante dans la vie de tous les jours, aux échelles les plus modestes. Quand bien même le repli contraint et la peur contagieuse dominent, des sursauts individuels et collectifs se manifestent, traduisant le besoin d’être à la hauteur de la situation.
Ce serait faire preuve d’un optimisme tout autant invétéré que de spéculer sur un élan irrésistible. La résilience du système – un mot devenu à la mode depuis qu’on peut en douter – est à considérer, vu le rétablissement que celui-ci a opéré lors de la crise précédente. Et on a pu déjà constater que ses représentants savaient mettre leur mouchoir dans la poche quand leur intérêt le commandait. Mais si nous ne sommes pas au bout de nos peines, eux non plus ! La crise sanitaire déborde largement dans tous les domaines de la vie économique et sociale. Les temps de guerre proclamés une fois dépassés, il sera retenu la nécessité de satisfaire les besoins essentiels, les esprits étant redescendus sur terre. Ce qui induira une réflexion sur la meilleure manière de les définir et d’y répondre, afin de ne pas tirer un trait sur ce qui aura été vécu.
Mais n’anticipons pas !
On dispose maintenant des listes de biens et services indispensables au fonctionnement minimal actuel de nos sociétés. Tout ces biens et services doivent maintenant être examinés avec pour objectif leur nationalisation totale ou partielle.
Bêtise vs intelligence, faites vos jeux…
Si un virus dont 80% des gens infectés guérissent (chiffre qui sera à vérifier a posteriori), quand sera-t-il lorsque nous serons confrontés à un virus vraiment agressif avec un taux de létalité supérieur à 50% ?
Les scientifiques nous préviennent depuis des années qu’au fur et à mesure de la destruction de nos écosystèmes, ce scénario est en train de passer de la case plausible à la case inévitable. Nul doute alors que nos chaines logistiques alimentaires seront alors totalement interrompues. D’autant plus qu’en France les paysans représentent à peine 3% de la population et qu’avec un si faible contingent, les moindres pertes un peu conséquentes signifient l’arrêt quasi-total de la production alimentaire.
Autre énorme problème en cas de pandémie à fort taux de létalité, le gigantisme de nos agglomérations urbaines : comment continuer à nourrir des dizaines de millions de citadins ?
Toutes questions auxquelles le néolibéralisme est intrinsèquement incapable de répondre !
Mais puisque les premiers de cordée nécessitent (encore) l’adoubement des gueux pour gouverner, pardon pour manager, n’oublions pas que la question de savoir qui de la bêtise ou de l’intelligence va l’emporter se pose aussi pour ceux-qui-ne-sont-rien.
Pour raviver la mémoire du regretté Desproges et son fameux « on me dit qu’il y a des juifs dans la salle », certains n’ont pas hésité à vivifier sa pensée sur le thème du « on me dit qu’il a des personnels soignants dans l’immeuble » :
Pression des voisins, cambriolages, voitures forcées… Le « coup au moral » des soignants
https://www.sudouest.fr/2020/03/29/pression-des-voisins-cambriolages-voitures-forcees-le-coup-au-moral-des-soignants-7371359-10861.php?utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=MaNewsletter&utm_term=20200330