Avec Aladin, les amateurs de complots sont servis ! Conçu et exploité par le plus grand des fonds d’investissement, BlackRock, Aladin est le système nerveux des plus grands intervenants sur les marchés financiers. Ce n’est pas sans raison, car il prétend permettre à ses utilisateurs de vérifier que les actifs qu’ils détiennent en portefeuille sont bien de qualité, une fois établi le risque dont sont porteurs les actions, obligations et produits dérivés du monde entier, ainsi que ceux des paires de devises pour faire bonne mesure. Une mission qui tient du miracle, on n’attendait pas moins d’Aladin.
Non seulement Apple, Microsoft et Google, qui gèrent des centaines de milliards de dollars chacun, en sont clients, mais c’est également le cas de Vanguard et State Street Global Advisors, les concurrents directs de BlackRock ! Tout comme le plus grand fonds de pension mondial, japonais, qui pèse 1.500 milliards de dollars. Une bonne part du gratin de la finance ne jure que par les vertus d’Aladin.
Le Financial Times est parvenu à établir qu’un tiers de ses utilisateurs gèrent 21.600 milliards de dollars d’actifs, ce qui représente environ un dixième du stock global des actions et obligations et en fait un pilier du marché mondial. Il n’y a pas de meilleure illustration de la forte dépendance des acteurs de la finance à une technologie qui s’apparente à une boite noire et n’est pas dans le champ de la régulation, comme c’est d’ailleurs le cas de leur créateur.
L’influence tentaculaire d’Aladin fait craindre qu’une cyberattaque, une intrusion de hackers ou tout autre évènement soudain et imprévu puisse avoir pour effet de déstabiliser le système financier, s’il venait à faillir. Sa situation de quasi oligopole crée en effet un risque de plus dans un monde qui n’en manque pas déjà. D’où sa fragilité qui grandit.
Et ce n’est pas tout ! Vu le poids que pèse BlackRock en tant qu’investisseur, le fonds n’échappe pas à de multiples conflits d’intérêts potentiels. Car il est à ce titre devenu un important actionnaire de nombreuses grandes entreprises qui sont par ailleurs ses clients : banques, compagnies d’assurance, fonds de pension et d’investissement…
Aladin est promis à un bel avenir, de nouveaux clients ne cessant de se présenter et les départs étant rares. À ce point que Larry Fink, son PDG, prévoit que son exploitation représentera en 2022 un tiers des revenus de BlackRock. On connaissait déjà l’importance prise par le trading à haute fréquence sur les marchés boursiers, on assiste avec Aladin et ses concurrents au rôle grandissant des technologies adossées au Big Data. BlackRock emprunte aux contes des Mille et Une Nuits, mais son génie libéré pourrait jouer des tours imprévus.