Il n’est plus question que de transition climatique, qui pourrait s’en plaindre ? La mobilisation semble générale, mais il va falloir passer de la parole à l’acte et même les observateurs les plus bienveillants s’interrogent.
L’hebdomadaire bien-pensant The Economist prend avec des pincettes les déclarations forcées du patron de BlackRock, Larry Fink, qui prétend « que nous sommes au bord d’une refonte fondamentale de la finance ». Le journal illustre ce que représentera son désinvestissement des actions et obligations des sociétés générant plus de 25% de leurs revenus à partir de la production de charbon : 0,1% du montant de ses actifs, autant dire qu’il sera très cosmétique.
Au Forum de Davos, le Financial Times a recueilli à ce même propos l’avis laissant rêveur de grands patrons américains. Michael Corbat, de Citigroup ne se voit pas « être la personne qui décide des vainqueurs et des perdants. Une banque doit soutenir les communautés dans lesquelles elle opère ». Chez Goldman Sachs, qui vient d’intervenir sur l’offre publique d’achat de Saudi Aramco, le géant du pétrole, David Solomon « n’est pas prêt à tirer un trait et refuser de conseiller les clients qui sont de gros pollueurs ». Et Brian Duperreault, de l’assureur AIG, a déclaré ne pas être prêt à cesser du jour au lendemain de couvrir les entreprises charbonnières. Fermez le ban !
Il faut les comprendre, ces grands patrons sont effrayés par le montant de l’addition que représente la proposition du FMI de valorisation de la taxe carbone. À 75 dollars la tonne, elle se monterait globalement à quatre mille milliards de dollars. Ce n’est pas raisonnable, comment pourraient-ils y faire face ?
La Commission européenne ne sait pas non plus comment financer cette transition pour laquelle elle recherche mille milliards d’euros sur dix ans. Thierry Breton, le nouveau commissaire en charge du marché unique et de l’industrie, a mangé le morceau en proposant que les États émettent des obligations à long terme qui pourraient être achetées par la BCE. Mais une telle transgression, même pour la meilleure des causes, ne va pas aller de soi pour tous ses gouverneurs. Jusqu’en décembre prochain, ceux-ci vont être très occupés à effectuer une revue stratégique, le prétexte à un grand tournant qui va occasionner des pleurs et des grincements de dents. S’il est pris, jusqu’où ira-t-il ?
Les États ne sont pas mieux lotis question disponibilités financières. Au risque de labelliser à tort et à travers leurs investissements pour remplir leur part du contrat, comme c’est le cas en Allemagne où le gouvernement va procéder au rattrapage du financement des infrastructures, notamment dans le transport ferroviaire.
Certes, à destination des parents pauvres que sont les pays en voie de développement, l’Agence Française de Développement (AFD) et les fondations allemandes Hewlett et Grantham se sont associées à BlackRock pour orienter à hauteur de 500 millions de dollars des capitaux afin « de combattre le risque climatique » selon un calendrier non précisé. Mais une hirondelle ne fait pas le printemps !
Un nouveau cheval de bataille a été trouvé avec le « green business », ranimant l’espoir d’une relance face aux prévisions de croissance de la zone euro – cet indicateur contestable – d’environ 1% cette année. À défaut, cela occupera les esprits.