L’ONU s’interroge sur la « qualité de la croissance » et sur ses impacts sociaux et environnementaux, dépassant ainsi l’opposition entre croissance et décroissance, avant de dresser un tableau sans complaisance de la situation économique et sociale mondiale.
Le gigantisme de l’endettement mondial ainsi que son usage dans le secteur financier est en premier lieu relevé, ainsi que la « déconnexion inquiétante » de ce dernier avec l’activité économique réelle. Et, quand la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced) en vient au monde du travail, la faible qualité de l’emploi dans les pays développés et l’importance de l’informalité chez les émergents est épinglé. Comment ne pas souscrire à ce constat ? Mais comment croire qu’il va avoir un quelconque effet ?
Une logique semble à l’œuvre qui n’est pas sans raison, une fois identifié le rapport étroit existant entre le gonflement du bilan des banques centrales et celui du système financier. Aujourd’hui encore, la Fed et la BCE continuent d’y injecter des liquidités. Et l’on observe le boursouflement des marchés d’action ainsi que des produits indiciels et des dérivés. On remarque à ce sujet l’essor de produits financiers nouveaux qui a pour origine la nécessité de procurer un débouché aux nouvelles liquidités disponibles sur les marchés financiers. Ainsi que, devenus leurs champions, le poids dominant et écrasant de quelques fonds d’investissement – ces acteurs de la finance informelle – qui bouleverse la physionomie du monde financier. Tout est étroitement lié.
À quelle logique obéirait donc ce processus ? L’objectif profond de ces injections massives de liquidités par les banques centrales ne serait-il pas au bout du compte d’assurer le refinancement de la dette – existante et à venir – afin que son édifice ne s’écroule pas, sa taille étant devenue sans rapport avec celle de l’économie réelle qui est en dernière instance sa garantie ? C’est l’explication qui tient la route qu’en donne dans le Financial Times Michael Howell, à la tête de la société de gestion de fonds CrossBorder Capital.
Si l’on en vient aux chiffres, la dette représenterait quelques 250.000 milliards de dollars, soit 320% du PIB mondial, et la liquidité disponible seulement la moitié de ce montant, soit environ 130.000 milliards de dollars. Il en ressortirait alors, ces montants mis sur le tapis, que les banques centrales n’ont pas fini d’injecter des liquidités dans le système afin de le stabiliser. Comme Sisyphe, elles seraient condamnées à pousser un rocher qui sans cesse retomberait.