Par les sombres temps qui courent, le démantèlement de l’Union européenne ne se traduit pas par des demi-mesures. Beaucoup d’explications sont données à la victoire des conservateurs et à la débâcle travailliste qui accréditent la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, mais une d’importance est négligée : le visage néolibéral que l’Europe a obstinément présenté aux électeurs britanniques du Labour n’a pas contribué à la rendre attirante, d’où leur vote.
Avec des hauts et des bas, la construction européenne allait de soi dans les esprits, et ce n’est plus le cas, un tournant est intervenu. Que les hautes sphères lui redonnent un sens semble d’autant moins garanti qu’il n’est pas question pour elles de revenir sur l’orientation acquise. Pour en rajouter, un sommet des chefs d’État et de gouvernement – le Conseil européen – vient se conclure sans qu’aucun des deux points de son ordre du jour n’ait été tranché. La remise en cause du compromis sur le label Vert trouvé par les négociateurs, et l’incertitude sur les moyens de rendre crédible l’objectif donné de neutralité carbone ont abouti à repousser à plus tard le début de la discussion sur le budget européen 2021-2027, qui ne s’annonce pas plus facile.
Aux difficultés particulières de la transition énergétique pour certains pays dépendant du charbon, comme la Pologne, ainsi qu’à son coût élevé, s’est ajouté la crainte des défenseurs de l’industrie nucléaire, au premier rang les Français, que le compromis salué trop vite par les Verts ne leur soit pas favorable au final. La décision ayant néanmoins été prise de confier à la Commission une réflexion sur l’instauration d’une taxe carbone à l’entrée de l’Europe, afin d’éviter d’être inondé par des produits venant des pays qui ne seraient pas vertueux, on attend la réaction du président américain en titre pour voir ce qu’il en sortira…
Quant au budget, tout fait désaccord à son propos, son enveloppe globale comme les coupes budgétaires auxquelles il faudrait procéder pour s’y inscrire, une fois défalquée la contribution britannique. Alors, faute de mieux, le Conseil européen s’est défaussé sur Charles Michel, son président. Un sommet pourrait être convoqué à ce sujet en février, dans l’espoir téméraire de conclure en juin prochain.
Les dirigeants européens ont par contre entériné des deux mains le projet de « Conférence sur l’avenir de l’Europe » d’Ursula von der Leyen, une longue séance de brain storming destinée à occuper les esprits et qui ne mange pas de pain dans l’immédiat. Les travaux des représentants du Conseil, de la Commission et du Parlement démarreront en 2020 et leur aboutissement est prévu deux ans plus tard. Histoire de ne pas perdre la main, les gouvernements allemand et français ont décrit en novembre dernier les objectifs qui pourraient être assignés à cette conférence, une sorte de programme minimum.
De quoi s’installer dans l’attente, aux accidents de parcours près, notamment italiens ! Les nouveaux dirigeants du SPD y contribuent, ayant choisi de ne pas bousculer la mariée et de poursuivre cahin-caha leur coalition avec la CDU-CSU, dans l’espoir de se refaire une santé avant une prochaine élection dont ils ne souhaitent pas précipiter l’échéance. Le nouveau commissaire à l’économie, Paolo Gentiloni, préconise de son côté « un changement d’approche » et suggère avec précaution et dans le flou l’adoption « d’un nouveau cadre… pour répondre à de nouveaux défis ». Au mieux, il prend date dans ce contexte où chacun observe l’autre, sans que rien de décisif ne puisse être entrepris.
Morne plaine…
Un quasi démantèlement du parti travailliste, qui fait penser au même événement en France, en Italie, etc. Ce sont surtout les bastions ouvriers qui ont déserté le parti et cédé aux sirènes « populistes » libérales. Et qui vont s’y accrocher d’autant plus si le « Royaume-Uni » se rétrécit et cherche son salut dans le dumping envers l’Europe.
Finalement c’est l’Europe libérale qui est la cause de cela, du désenchantement d’un modèle sans politique fiscale et sociale. Avec la fin des trente glorieuses. Et sans doute « l’élargissement avant l’approfondissement ». Cela rend impossible un surcroit de sens de l’Europe pour les travailleurs, ceux qui participaient au progrès avec la social-démocratie.
Une image (projections « sérieuses » ) d’une clarté « aveuglante » :
https://infographic.statista.com/normal/chartoftheday_20082_uk_election_lab_con_voting_intention_by_age_n.jpg