Interdire la vente à découvert, vous n’y pensez pas ! La pratique instituée qui consiste à parier sur la baisse du cours d’une action, quitte à mettre la chance de son côté en lançant des rumeurs, est par trop lucrative. Elle occupe dans le monde financier une place insoupçonnée, car elle fait des heureux des deux côtés, de celui des emprunteurs de titres comme de celui des prêteurs qui n’y rechignent pas afin d’arrondir leurs fins de mois. Mais il ne faudrait pas tomber dans l’excès !
Le temps semble venu de l’encadrer en raison des proportions qu’elle prend, qui ne sont pas sans rapport avec la baisse des taux d’intérêt, car il faut bien vivre et les prêts de titres y contribuent ! Ceux qui pratiquent la vente à découvert et qui la facilitent, les hedge funds et les banques, se défendent en prétendant qu’elle permet de dégonfler les bulles financières et de faire baisser les titres surévalués. Un argument qui vaut celui des opérateurs de trading à haute fréquence lorsqu’ils assurent améliorer « la liquidité » du marché. Les entreprises qui en sont victimes, comme Tesla dernièrement, réclament son interdiction. Ce à quoi les premiers rétorquent qu’ils ne font que profiter de la perte de confiance qui résulte des comptes non sincères, quand c’est le cas, des responsables d’entreprises.
Le plus gros fonds d’investissement, qui gère les retraites des japonais et dont le portefeuille représente 1.500 milliards de dollars, a pris une décision qui a fait trembler tous les acteurs de la vente à découvert. Il a annoncé ne plus vouloir prêter – moyennant finance – les actions qu’il détient, ce qui lui rapportait bon an mal an 300 millions de dollars nets selon le Financial Times. S’il faisait des émules, que deviendrait ce marché ?
Que va-t-il sortir des débats sur l’encadrement de la vente à découvert dont l’écho est sorti des cénacles financiers ? Il est question de remédier à son « absence de transparence », et certains pousseraient l’indiscrétion jusqu’à demander que leurs acteurs agissent à visage découvert. Allons, il faut savoir raison garder, car on finirait à force par en arriver à son interdiction ! Seule la Commission pouvant formellement la décider, la vente à découvert a encore de beaux jours devant elle. Des obligations de reporting auprès de « dépositaires agréés » entreront en vigueur en avril prochain. Dans quelles conditions pourra-t-il y être accédé ? le suspense est intolérable.