Le 12 décembre prochain, c’est décidé, les chefs d’État et de gouvernement de l’Eurozone vont plancher sur l’extension des missions du Mécanisme européen de stabilité (MES), ce fonds des mauvais jours quand un pays entre en crise. Figurent aussi au menu le budget de la zone monétaire et la garantie des dépôts bancaires.
Les perspectives d’aboutissement des débats ne sont pas au beau fixe, témoignant du piteux état de l’Union européenne. On savait déjà que la garantie des dépôts bancaires est soumise au mieux à des conditions irréalistes, et que le budget d’investissement n’est qu’une mauvaise caricature. Mais ce que l’on n’avait pas prévu, c’est la virulente réaction italienne à l’autre point de l’ordre du jour, c’est à dire à la réforme du MES. De Guiseppe Conte à Matteo Salvini en passant par Luigi Di Maio, cela n’a été qu’un même cri du cœur : l’Italie ne souscrira jamais à une réforme la désavantageant !
La méfiance vis-à-vis des autorités allemandes s’est désormais installée, le MES dirigé par Klaus Regling suspecté des plus perfides intentions n’y échappant pas. Renforcer son rôle n’est donc pas une option, sans compromis possible. Pour Matteo Salvini, le prétendant au pouvoir, la réforme du MES n’a tout simplement pas d’autre objectif que de ruiner l’Italie.
Or l’échéance de l’examen par la Commission des budgets 2020 approche, et déjà des courriers ont été adressés aux gouvernements risquant la « non-conformité » (avec les règles de déficit et d’endettement). La France n’est pas le seul mauvais élève, la Belgique, l’Espagne, l’Italie, le Portugal, la Slovénie, la Slovaquie et la Finlande l’accompagnent sur cette même voie, tous destinataires du même avertissement pour l’instant sans frais. Pour la suite, on va voir ce que l’on va voir, Ursula von der Leyen, la nouvelle présidente de la Commission, se préparant à prendre enfin ses fonctions !
C’est dans un climat tendu que Christine Lagarde a prononcé son premier discours de présidente de la BCE. Elle s’est contentée de promettre d’ouvrir « prochainement » un débat sur la stratégie et a éludé le sujet épineux des objectifs et outils de la politique monétaire, mais ce n’est que partie remise. Son intervention a été axée sur le renforcement des investissements publics ainsi que sur l’harmonisation des marchés financiers et des banques. Puis sur la nécessité de rééquilibrer l’économie européenne en faveur de la demande. Enfin, de nouveaux besoins d’investissements productifs sont apparus auxquels il faut selon elle répondre. En gros, Christine Lagarde a traité de tout ce qui n’est pas du ressort de la BCE, rappelant que, selon la formule devenue habituelle mais sans effet, la politique monétaire ne peut pas tout.
Sempiternelle question, peut-on attendre une ouverture allemande dans les semaines qui viennent et s’annoncent riches en épisodes côtés SPD et CDU/CSU ? Les craquements au sein des formations de la coalition gouvernementale ne vont susciter que des remèdes palliatifs sans porté, à cent lieues d’une remise en cause de dogmes profondément ancrés et pour tout dire largement partagés. Comme il n’y a pas de solution de remplacement au moteur franco-allemand devenu fictif de la construction européenne, les apparences vont tenter d’être sauvées.