À propos de l’Allemagne, les questions ne manquent pas. Combien de temps la Grande coalition au pouvoir va-t-elle tenir ? Peut-on attendre un assouplissement de sa politique d’austérité budgétaire ? L’alliance franco-allemande est-elle toujours le moteur de la construction européenne et quelles en sont les perspectives ?
Arrivée à mi-mandat, la coalition entre la CDU/CSU et le SPD tient toujours le coup, pour une simple raison : les deux partenaires considèrent ne pas avoir intérêt à une rupture et la font donc durer. Tenant leur congrès, les Verts qui ont le vent en poupe ont clairement manifesté leur intention d’accéder au pouvoir et ont abandonné leur vieille ligne pacifiste pour se déclarer en faveur d’une défense européenne, se rapprochant du point de vue de la direction de la CDU. Mais ils vont devoir patienter en confortant leur place de second parti devant la SPD. Jusqu’à quand ? cela reste une inconnue.
La critique de la politique budgétaire allemande a pris une soudaine ampleur avec l’émergence d’une coalition sans précédent de la fédération de l’industrie allemande (BDI) et de la confédération allemande des syndicats (DGB) qui ont rendu public un document commun réclamant 475 milliards d’euros d’investissement. Pour toute réponse du gouvernement, ils ont reçu une fin de non-recevoir d’une Angela Merkel défendant mordicus le principe d’un budget fédéral à l’équilibre tel qu’inscrit dans la loi fondamentale. Mais il est symptomatique que, prétendant néanmoins favoriser la croissance allemande dans ce cadre, elle n’a fait aucune référence à celle de l’Europe. Or, il va falloir affronter une cruelle réalité : l’Allemagne va être à son tour victime de la politique imposée par son gouvernement. L’Europe est son principal marché et les principaux autres, Chine et États-Unis, enregistrent un net recul de ses exportations. Le pays fait face à deux crises, de son modèle de croissance et de son fleuron l’industrie automobile.
Il n’y a pas de substitut à l’alliance franco-allemande, raison pour laquelle elle va perdurer. Là encore, l’absence d’alternative conforte l’existant. Cela n’est pas très prometteur et seules des mesures limitées sont à en attendre. La construction européenne est en panne pour cause de profond désaccord et cela va durer. Et ce ne sera pas l’arrivée des Verts au gouvernement qui changerait la donne, car ils concentrent leurs efforts sur l’abandon de la politique d’équilibre budgétaire allemande et non pas sur la révision des traités afin de développer une politique d’investissement européenne.
À ce sujet, l’Allemagne a en réalité bon dos. Car l’austérité budgétaire et l’épouvantail de l’endettement sont le prétexte rêvé justifiant de couper dans les crédits des programmes sociaux et de poursuivre la réduction des moyens publics. À condition toutefois de ne pas trop charger la barque, au risque de susciter des mouvements sociaux spontanés et redoutés par les temps qui courent.