Peut-on imaginer avoir contracté une dette et ne pas savoir avec qui ? Cela semble parfaitement incongru, mais c’est pourtant le sort des États qui sont globalement dans l’ignorance de l’identité des détenteurs de leurs obligations souveraines. Cela n’est pas sans avantage, peut-on remarquer au passage, puisque cela permet aux âmes bien intentionnées de menacer des foudres d’un marché hors de portée les contestataires de leurs diktats dogmatiques. Nouveauté, lever ce voile est à portée !
Certes, les banques centrales rendent public des agrégats, comme par exemple la part des investisseurs étrangers possédant la dette nationale, et on connait aussi les titres qu’elles détiennent par elles-mêmes, mais tout le reliquat ne peut faire l’objet que d’estimations. Les détendeurs restent anonymes d’autant plus qu’ils peuvent avoir acheté de la dette sur le second marché de la revente et non pas à l’émission. L’anonymat reste la règle, l’identification du porteur une exception.
Les États et le pouvoir politique sont-ils à ce point impuissants qu’ils n’ont d’autre recours que les données imprécises de leur banque centrale nationale ? Tracer la détention de la dette publique se révélerait-il impossible ? Faut-il préserver l’anonymat de ses porteurs et pourquoi ? Dans un monde financier qui cultive l’opacité, celui-ci ne dépare pas. Et ce serait précisément une excellente raison d’y remédier en permettant aux débiteurs d’identifier leurs créditeurs. Ceux-ci savent d’ailleurs se donner des représentants, ou bien voter pour accepter ou non une décote lorsqu’un pays fait défaut, la dette devenant pratiquement insoutenable et imposant une négociation.
La référence au marché pour justifier son impuissance n’est qu’un prétexte. Car les gros détenteurs de titres souverains ne sont pas tout à fait des inconnus, en particulier lorsqu’ils sont institutionnels, leurs motivations non avouées pouvant d’ailleurs être clairement politiques. Ce n’est d’ailleurs qu’une des illustrations de la symbiose entre la finance et les autorités politiques, les « fonds vautours » qui planent à la recherche de leur proie jouant le rôle des chiens de garde.
Nous ne sommes pourtant pas démunis si l’on cherche à en savoir plus. Les nouvelles technologies pourraient contribuer à dévoiler le mystère ; plus précisément la technologie Blockchain et ses bases de données sécurisées. Les emprunteurs pourraient grâce à elles identifier leurs investisseurs sur le marché obligataire et vérifier l’usage effectif de leurs obligations quand elles sont « vertes » ou « sociales », ce qui devient au goût du jour.
Il y a du bon et du mauvais dans les nouvelles technologies, cela dépend comment on s’en sert et du contrôle de leur utilisation. Les fantasmes ne manquent pas à leur égard, et il leur est beaucoup prêté dans des discours marketing pris pour argent comptant. L’enjeu est pourtant là : afin de séparer le bon grain de l’ivraie, tout est une question de réglementation et il n’y a pas de raison d’abdiquer.
Connaitre l’identité des détenteurs d’une dette souveraine est inenvisageable. Comment ensuite justifier les politiques de dépeçage, pardon d’austérité, s’il est prouvé que le caractère insoutenable d’une dette est connu de tous et que malgré tout, tous refusent sa restructuration ?
Mettre le doigt dans l’engrenage de la transparence c’est à terme courir le risque de voir les populations rejeter comme illégitimes des parts entières de la dette. C’est s’attaquer à l’arme principale du néolibéralisme, un véritable suicide pour les marchés.
Petit rappel :
Commission pour la vérité sur la dette grecque : Synthèse du rapport préliminaire
https://france.attac.org/nos-publications/notes-et-rapports/article/commission-pour-la-verite-sur-la-dette-grecque-synthese-du-rapport-preliminaire
La transparence est source de danger pour cette mafia financière et s’en prémunir en mettant l’un des siens au plus haut sommet de l’état est la meilleure garantie qui soit.
C’est le cas dans notre pays avec Jupiter qui refuse de dévoiler les noms des financeurs de sa campagne électorale et qui a osé se prétendre ni de droite ni de gauche, avançant masqué pour la plupart de l’électorat.
Lorsque la situation se tend, il suffit de frapper fort, dans les yeux de préférence.
A quelques jours d’un mouvement social majeur de défense des retraites, les éventuels ordres de réprimer dans la violence les contestataires ne feront que transiter par l’Élysée.
Révolution était le livre programme de notre Président, le second que nous envoie la banque Rotschild après G.Pompidou.
Révolution à accomplir au service de cette mafia de l’ombre.