L’’insouciance s’est dissipée et l’utilisation abusive de nos données est devenue un sujet mieux partagé de préoccupation. Et il ne se passe pas de jours sans qu’un nouvel usage à visée lucrative soit découvert, les GAFA se révélant particulièrement actifs. Qu’est-ce qui arrêtera ce processus diabolique ?
Les banques avaient pris les devants lors de l’émergence de la technologie blockchain, en la bridant pour leurs besoins, car ses fonctionnalités de base représentaient une menace directe pour leur activité d’intermédiation dont elle supprimait la nécessité. Aujourd’hui, elles doivent enregistrer le lancement de services bancaires par Facebook, Apple et Google. Bien que protégées par leur statut réglementé, leur activité soumise à autorisation, comment pourraient-elles dormir sur leurs deux oreilles au vu de la puissance financière de ces acteurs, et surtout du volume immense de leur portefeuille d’utilisateurs qu’ils cherchent à valoriser d’avantage ?
Pourquoi donc les GAFA vont-ils s’impliquer dans un secteur d’activité protégé et très sensible, peut-on se demander ? La raison en est simple, accéder aux mouvements sur les comptes bancaires est hautement instructif et les données issues des transactions sont éminemment monnayables une fois traitées…
Mais c’est le domaine des données médicales qui a ces temps derniers la vedette. Le Financial Times a enquêté au Royaume Uni et découvert que les sites de santé y partagent allègrement les données médicales des internautes s’y connectant avec des sociétés du secteur de la publicité en ligne dans le monde entier, sans demander leur consentement explicite. Pire encore, le Wall Street Journal vient de dévoiler l’accord resté confidentiel passé par Google avec Ascension, l’un des plus importants groupe privé du secteur de la santé américain. Au terme de celui-ci, il aura accès aux dossiers médicaux intégraux de millions de patients dont l’identité sera mentionnée.
L’objectif de l’opération serait d’apporter une aide aux praticiens grâce à l’analyse des données avec des technologies relevant de l’Intelligence Artificielle. Google prétend avoir fourni toutes les garanties de non divulgation de ces données et ne circonvenir à aucune loi ou réglementation, mais au nom de quelle innocence peut-on être certain de ce que l’avenir réservera ? À noter d’ailleurs que Google n’est pas seul à avoir des ambitions déclarées dans le domaine de la santé, c’est également le cas d’Apple dans le cadre de sa diversification dans les services, ainsi que d’Amazon.
La bataille avec ces nouveaux géants est inégale tant ils ont des intérêts à faire valoir et les moyens d’y parvenir. Les barrières juridiques ne sont pas à la hauteur des exigences requises et arrivent en retard. La dissémination des données personnelles est un phénomène sans retour et la revendication de leur propriété par chacun d’entre nous est illusoire dans l’état actuel de la législation. Car curieusement cette propriété-là n’est pas considérée comme sacrée.
L’étroite collaboration « à la mode chinoise » instituée entre le Parti-État et l’équivalent des GAFA comme Alibaba apporte un élément de réflexion supplémentaire. Les activités commerciales et de surveillance y sont étroitement imbriquées et constituent un modèle qui pourrait bien donner de mauvaises idées, si ce n’est déjà fait…